L'histoire :
Alex (un peu gros) et Moudy (un peu noir) travaillent au tri des déchets pour la commune de Romainville, en banlieue parisienne. Leur quotidien est clairement pourri : le père d’Alex vient de clamser et Moudy ne supporte plus les regards des autres membres qui vivent avec lui au foyer et qui sont au courant de son homosexualité. Il a décidé d’aller habiter ailleurs. Dans un premier temps, un ancien entrepôt désaffecté et promis à la destruction dans moins d’une semaine, lui semble un squat tout indiqué. De là-haut, il a une super vue sur le canal et le camp gitan d’en face. Pendant ce temps, Samir vend des clopes de contrebande à Barbès, sous les voies du métro aérien. Lui aussi en a marre de cette vie de merde et des flics qui le taxent. Mais il lui manque 300 euros sur les mille requis pour avoir de nouveaux papiers. Et ça, ça le fout en rogne. Aussi, lorsqu’il aperçoit les biftons que tendent Alex et Moudy à un dealer de beuh, il agit avec promptitude : il les chope au vol et se barre en courant. Les deux zigues lui flanquent aussitôt une poursuite. Occupé à regarder derrière lui, Samir ne voit pas un poteau indicateur et se le prend en pleine tronche. Non seulement il est sonné, mais Alex et Moudy lui rétament la face en prime. Débarquent alors les flics du quartier, les ripoux…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Deux ans après avoir livré une bien glauque Fête des morts se déroulant dans un décor exotique, Stéphane Piatzszeck et Olivier Cinna récidivent dans une veine tout aussi désespérée et sordide, sur notre « bon » territoire français. Ici, nous suivons le quotidien désœuvré de trois « cailleras » de banlieue qui évoluent dans des bas-fonds urbains contemporains. Les deux premiers gredins ont pourtant un métier d’avenir : ils trient les Ordures dans un centre intercommunal. Immigré sans-papier, le troisième survit de petits trafics en espérant acheter sa nationalité. Le premier tome du diptyque annoncé les met essentiellement en contexte et en relation, avant de nous abandonner juste après un climax funeste. Vue la merde dans laquelle ils s’enfoncent plus encore, l’intrigue s’étoffera vraisemblablement dans le second tome. Pour le moment, on profite essentiellement de la mise en scène crue et hard-boiled, sans concession, qui laisse souvent le visuel muet s’exprimer, dessinée à grands coups d’encrages jetés en noirs et blancs bien contrastés. Moins caricatural et cynique que du Baru, mais tout aussi efficace dans la peinture d’une société des laissés-pour-compte.