L'histoire :
Enrico fait partie des personnages de la petite ville de Villerupt, la capitale italienne de la Lorraine, là où tellement d'immigrés italiens se sont installés après la seconde guerre mondiale pour travailler dans les mines. Mais Enrico ne s'appelait pas toujours Enrico. Pendant la guerre son nom était Heinrich Becker, un soldat allemand communiste qui n'était pas tout à fait dans la ligne idéologique de son pays de naissance. Comment Enrico a-t-il pu s'intégrer dans la communauté italienne ? Les versions diffèrent, mais pourtant, il est bien là. En Lorraine, au milieu du conflit, il y avait un camp de travail à Errouville, où se sont retrouvées enfermées de nombreuses femmes en provenance de l'Est de l'Europe, parmi lesquelles un petit groupe forment un détachement de la résistance française, dont le courage et le refus de se dissimuler leur vaudront la reconnaissance de la France libérée. Dans les années soixante-dix, c'est Teo qui cherche à comprendre ce qui s'est passé avec les courageuses Rodina, et d'où vient Enrico. Il en parle avec ses amis qui s'en soucient bien moins que lui. Mais pour lui, ça compte...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Baru poursuit inlassablement son travail de sociologue de la BD en mettant en scène cette recherche historique sur la communauté à laquelle il appartient encore. Il y a comme toujours chez lui une proximité formidable avec les gens qui constituent cette population emblématique de l'immigration italienne de la première moitié du siècle dernier. Il le fait avec légèreté et sérieux, trouvant à chaque nouvel album une nouvelle petite portion de cet héritage peu connu à décrire, à mi-chemin entre réalité et interprétation personnelle. L'auteur aux plus de vingt albums déroule avec aisance un style qui n'a presque pas bougé depuis près de 40 ans. L'énergie est toujours la même, la différence se fait dans une liberté de ton et de construction que seuls peuvent se permettre les piliers du métier. Rodina est intéressant et touffu à la fois. L'album effleure son thème principal pour mettre davantage l'accent sur ceux qui racontent son histoire. Tendresse et témoignage se mélangent sans contrainte, selon les envies de l'auteur qui brode avec humour, et réunit comme toujours ses personnages dans un coin de cuisine d'une ville ouvrière où les émotions sont mises en scène. Un album totalement fidèle sans être surprenant, mais qui devrait donner envie à ceux qui n'ont pas lu Bella ciao de réparer cette erreur au plus vite, porco dio !
