L'histoire :
José, un soldat, a tout l’avenir devant lui et il est ambitieux. Il croise la route de la belle Carmen, un jour de marché à Séville. La farouche beauté a remarqué ce jeune novice et jette son dévolu sur lui. Pour attirer son attention, elle se moque de son costume rafistolé. La foule rit à ses plaisanteries. D’un coup, elle lui lance une rose blanche au visage et le regarde d’un air amusé avant de tourner les talons. Elle retourne ensuite dans la manufacture de tabac où elle travaille. Mais elle se dispute avec une employée. Cette grosse mégère la traite de fille du diable. Carmen compte bien lui montrer que sa réputation n’est pas usurpée. Elle compte lui faire ravaler ses insultes. Elle se rue sur elle, un couteau à la main, et l’immobilise facilement. Pour lui montrer qu’il ne faut pas manquer de respect à Carmen, elle lui laisse un souvenir indélébile en lui tailladant le visage. Le sang gicle et tombe sur les mains de Carmen. C’est l’effroi alentours. On redoute de ce que peut faire la sauvage bohémienne. La garde intervient juste à temps et un jeune soldat parvient à lui faire lâcher le couteau. Carmen se retourne, folle de rage, mais son visage s’adoucit d’un coup. Elle reconnaît le beau jeune homme qu’elle a précédemment croisé…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Carmen est un personnage devenu légendaire, que ce soit à travers la nouvelle de Prosper Mérimée ou l’opéra de Bizet. Elle a sa place au sein du nouveau cycle de mythes consacré par Glénat aux légendes plus modernes. L’adaptation en BD est également facilité par un récit original de Mérimée plutôt court. Comme souvent dans cette collection, la narration reste fidèle à l’œuvre originelle. Quasi cinématographique, l’histoire de Carmen se prête bien au format bande dessinée. Le personnage, tout d’abord, est une fascinante séductrice aux objectifs troubles et complexes. La force de cette œuvre est de montrer une femme qui tente de survivre, qui joue avec les hommes et se fait passer pour un démon tentateur. Pourtant, l’ambiguïté restera toujours de mise, Carmen oscillant entre manipulatrice dangereuse et martyr d’une société machiste. Le couple qu’elle forme avec Don José transcende le mythique couple de Roméo et Juliette puisque, par amour, José se parjure et devient un bandit de grand chemin. Lui qui était pourtant un soldat consciencieux, au départ ! Cette preuve d’amour magnifique fait également réfléchir sur l’amour passion. Luc Ferry profite des annexes habituelles de la collection pour une analyse philosophique brillante de cet amour qui nous fait tant rêver et qui nous échappe souvent, comme Carmen au fond. On regrettera toutefois une fin bâclée et expéditive, qui enlève le tragique de ce couple légendaire. Le reste est bien développé, mais les tensions entre Carmen et José passent beaucoup trop vite. Le dessin de Gianenrico Bonacorsidecot également. On peut louer ses efforts avec des planches travaillées, mais ses personnages aux visages très particuliers manquent vraiment de charisme. A l’image de Carmen qui est plutôt laide, bien loin de là superbe couverture qui promettait pourtant un album enflammé.