L'histoire :
Lorsque la lectrice d'un célèbre auteur de BD érotiques lui écrit les fantasmes qu'elles a réalisés, l'auteur décide de les mettre en images. Sandra F est torturée par une sourde angoisse, un désespoir face à l'existence, qu'elle combat en se mettant en scène dans des situations très osées. Elle s'assoit alors sur les marches du pont San Pancrazio, écarte les jambes et dévoile son intimité nue sous sa robe, puis compte jusqu'à cent. Loin du pur exhibitionnisme, une femme est également présente dans chaque panneau de la fresque historique qui traverse l'histoire du monde et les grands événements. Nue à la préhistoire, en robe d'apparat dans la cour des rois, en tenue garçonne dans les années 20, elle traverse les drames des temps anciens et modernes, naturellement au cœur des enjeux de l'évolution du monde. Terrifiante et cruelle, comme Salomé vue par Oscar Wilde, perdue dans des fantasmes masochistes, comme Wilma qui se confie à ses amies, ou simplement belle comme cette jeune femme qui danse avec un clown peint sur le mur de Berlin... les envoûtantes chimères ne laissent personne indifférent.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce nouveau recueil des travaux de Milo Manara contient de jolies perles immorales et légères et quelques surprises inédites en album. Ainsi en va t-il d'une étonnante fresque historique et incorrecte, qui débute aux origines de l'homme et aboutit à l'an 2000. L'ensemble de ces petites histoires réalisées entre les années 1979 et 2009 témoignent toutes du talent graphique hallucinant du dessinateur italien, incomparable pour mettre en scène de belles femmes minces dans des postures suggestives. Mais cet album n'a pas uniquement pour but de montrer de jolies créatures aux fantasmes sexuels multiples. Chaque nouvelle nous emmène vers un horizon différent, parfois historique, souvent joliment onirique. C'est d'une vraie cohérence que cet auteur à la personnalité marquante a fait preuve à travers des décennies de travail, donnant une élégance et une part de rêve très particulières à son œuvre, y compris lorsqu'elle décrit les états d'âme de jeunes femmes ravissantes et exhibitionnistes. Les pleines pages sans texte publiées ici transportent le lecteur, comme dans la nouvelle Nubilove, jamais publiée de ce coté-ci des Alpes. Mais le journal intime de Sandra F atteint quant à lui une sorte de sommet dans l'art désinhibé de Manara, provocateur et visuellement époustouflant. Cet immense artiste a toujours choisi les sujets qu'il voulait traiter, en complétant son exigence graphique sublime d'une volonté de concision qui traverse cet album de manière spectaculaire. Un très beau recueil, pour public averti.