L'histoire :
« Le mordu » est serbe. Passé clandestinement en Italie, il a traversé sans aucune difficulté les frontières de notre Marché Commun, pour se retrouver finalement à Dortmund, en Allemagne. Accueilli par son oncle, le respecté maître Mïle, le mordu s’est installé dans sa nouvelle vie. Vivant de trafic en tous genres, drogue, putes et gangstérisme de haute volée, il a intégré un groupe de têtes brûlées sans foi ni loi, qui ne tolère pas le moindre manque de respect. S’il se sent parfaitement dans son élément, il n’obéit somme toute, qu’à lui-même. Il tente régulièrement de joindre Belgrade, où la guerre continue de faire des ravages. Il a un peu le blues de ce pays où il a été soldat, mais qu’il a du fuir, après avoir assassiné un flic. Il rêve d’une autre condition, d’une autre fuite en avant, peut-être en Suède. Il veut encore pousser plus loin, à travers cette « Europe lumineuse et innocente », en arrachant à sa condition Sladjana, une pute qui appartient à la famille…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
« Le mordu » porte bien son nom. Mordu par les pires aspects de l’existence, cette tête brûlée formatée par la guerre, au comportement auto destructeur, fait penser au personnage de Jodorowski, Juan Solo, dans ce qu’il a de plus négatif. Son destin ne peut résider que dans une fuite en avant, oubliant immédiatement derrière lui tout ce qu’il a détruit. Ainsi va ce road-movie noir et désenchanté, violent et réaliste, puissamment orchestré par un TBC (alias Tomaz Lavric) en grande forme. Après avoir dessiné le quatrième tome du Décalogue et lancé la série Lomm, cet artiste yougoslave nous fait réfléchir sur des dommages de guerre, plus insidieux que les pertes humaines ou matérielles : la destruction des comportements sociaux. Livrant de main de maître un dessin réaliste, sans chercher les effets de style, TBC ne vise que la retranscription d’une vérité crue. Conclusion d’un diptyque sombre qui prend aux tripes, sans concession pour l’être humain.