L'histoire :
Au début des années 1930, Franklin D Roosevelt est candidat à l'élection présidentielle de 1932. Il faut passer par l'investiture démocrate. Son conseiller lui confirme qu'il aura le soutien de Joe Kennedy. Le futur président n'aime pas beaucoup cet homme aux relations multiples qui lui offre des fonds, mais aussi le soutien d'un patron de presse peu scrupuleux. Joe Kennedy est un homme d'une ambition démesurée qui rêve de réussite pour lui et pour ses descendants. Il veut par tous les moyens faire oublier définitivement les origines irlandaises de sa famille, synonymes de moquerie depuis l'arrivée massive d'immigrants lors de la grande famine des années 1850. Patrick Kennedy, son grand-père, était le premier de la lignée débarquant à Boston. Mort prématurément, c'est son fils qui démontrera le premier une ambition et une force de travail hors du commun, passant de docker à tenancier de bar, puis importateur d'alcool, ami des politiciens démocrates et finalement élu à la chambre des représentants du Massachussetts. Il fondera une banque et sera très vite admiratif de son fils Joe, bourreau de travail qui, dès l'adolescence, multipliera les petits boulots pour gagner son propre argent. Il intégrera Harvard et ce sera le début d'une ascension faite de jeux d'influence sans scrupule, et d'une soif inépuisable de plus de pouvoir, pour lui et très vite pour ses enfants. Plus exactement ses deux garçons, Joe junior et Jack, qui deviendra plus tard John Fitzgerald. La réussite politique est promise à Joe Jr, mais il va perdre la vie en héros durant la seconde guerre mondiale. Jack, plus réservé, souvent malade mais supérieurement intelligent, va se révéler.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Philippe Pelaez plonge loin dans l'origine du clan Kennedy, avec le débarquement d'un million d'irlandais qui fuyaient la famine au XIXe siècle, pour finalement approfondir l'histoire de JFK, dont la fin tragique reste un moment marquant de l'histoire contemporaine. Le travail est absolument énorme. Près de 500 pages impressionnantes qui prennent tout le temps nécessaire pour nous faire comprendre que le destin du président assassiné à Dallas n'est pas le fait du hasard. Le portrait de famille n'est pas reluisant, l'ambition est à toutes les pages, les relations troubles, les passe-droits, la mafia... On voit comment la famille menée par Joe s'est appuyée sur tous les moyens possibles pour parvenir à ses fins. Jack Kennedy, alias John Fitzgerald, s'en sort un peu mieux que d'autres membres de la famille, avec sa personnalité fragile et son intelligence réelle. Il n'est pas décrit en pantin de son paternel, et ses initiatives politiques sont mises en avant, tout comme un véritable courage pendant la guerre. Mais il n'y a, dans cette biographie, aucune complaisance ni admiration naïve. La lecture est passionnante, jamais ennuyeuse. On se demande longtemps comment l'auteur va aborder l'assassinat, et on est impressionnés par la description implacable qu'il va faire d'un dossier très louche et non élucidé. Chronologique avec des flashbacks qui font respirer le tout, le livre est illustré avec une belle constance par Bernard Khattou, dans un style classique, un noir et blanc à l'américaine parfaitement adapté. C'est un véritable exploit aussi sur ce plan, une montagne de travail maitrisé. Jetez un œil à ce pavé qui ferait une parfaite idée cadeau, en tout cas une lecture instructive pour tous ceux qui auraient un peu survolé la saga familiale qui a marqué l'Amérique. Le même pavé sur la dynastie Trump reste à écrire. On n'est pas pressé pressé.