L'histoire :
Enfermé dans une chambre au Vatican sous la garde du Cardinal Stimac, Merwan Khader a fini par comprendre quel était son destin : poursuivre l’œuvre entreprise jadis par l’écrivain Halid Riza pour démontrer que l’Islam est, selon les préceptes du Prophète, tolérance, amour, recherche de vérité. Ce projet passe néanmoins par la découverte de documents autrefois en la possession de Riza, rédigés de la main de Mahomet et cachés quelque part au Caire. Stimac, qui par le passé était un ami proche de l’écrivain turc, partage les mêmes ambitions. A l’heure où le pape vient d’être victime d’un grave attentat de la part d’intégristes musulmans, le Cardinal Stimac est pressenti pour lui succéder. Rien de telle, alors, pour assurer son élection, que de détenir « une arme » pour faire fléchir l’intégrisme à jamais. Il fournit donc une nouvelle identité à Khader qui, se faisant passer pour un étudiant doctorant, rejoint le Caire. Il a pour mission de fouiller le Musée National, vraisemblable « cache » utilisée par Halid Riza. Bénéficiant sur place de l’appui d’agents du Vatican, le jeune français tourne néanmoins en rond : pas moyen de retrouver les lieux décrits par l’écrivain. Pour corser le tout, Merwann craint que sa couverture ne soit rapidement mise en pièce, lorsqu’il rencontre Latifa par hasard, une ancienne amie qui le reconnait immédiatement. La jeune femme venue assister au Congrès International des Femmes Musulmanes ne tarde d’ailleurs pas à être interrogée par les organisateurs sur cette fortuite rencontre…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Spin-off malicieux né des intrigues développées principalement dans les tomes 2, 3 et 4 du Décalogue, ce cycle parfaitement autonome aura néanmoins permis de faire vivre à la série mère un judicieux rebondissement. Pour autant, le final offert par ce 5e opus s’interdit toute révélation définitive, en laissant le choix au lecteur de tirer ses propres conclusions. Du coup, sur le plan strict de la trame utilisée pour construire la nouvelle intrigue (la recherche d’une sourate inédite, émanant du Prophète Mahomet, prônant la tolérance), l’utilisation de 5 chapitres n’était pas justifiée. On sent bien que notre talentueux scénariste a tout fait pour épaissir le mystère et susciter l’action (et justifier 5 albums…). Mais ça ne fonctionne qu’à moitié. Ici, par exemple, on regrettera que tout soit finalement assez facile pour que Merwan parvienne à ses fins. On l’aurait aisément vu en découdre un peu plus avec ses ex-compagnons intégristes. De même, on se demande bien pourquoi avoir fait « revenir » Latifa pour lui offrir une telle destinée… Enfin, pour ce qui est de cette fameuse sourate, on reste un peu le bec dans l’eau. Malgré tout, l’ensemble est une nouvelle fois des plus captivants. Outre le pouvoir de conteur mis en lumière par une narration brillante et fluide, un dessin au parfait tempo, c’est à nouveau l’exercice réalisé par Frank Giroud qui est des plus plaisants. Car ne le cachons pas : l’intérêt principal de ce prolongement, est de s’amuser au coté du scénariste à le voir tirer le fil de la pelote constituée par l’écheveau de son Décalogue. Le Légataire nous permet ainsi d’unir brillamment certains tomes de l’œuvre principale, de faire la lumière sur certaines zones d’ombres ou d’offrir une seconde vie à ses protagonistes, de fait encore plus attachants. En somme, une démonstration géniale qu’en prenant son œuvre ésotérique dans n’importe quel sens, quel que soit l’angle d’attaque, Frank Giroud nous aurait passionné. A conseiller indéniablement.