L'histoire :
En juin 2020, la capitale serbe, Belgrade, est à feu et à sang. En raison d’un engrenage indépendantiste, la poudrière des Balkans s’est de nouveaux embrasée. Des sociétés militaires privées se sont emparées du chaos ambiant pour y faire un juteux trafic d’armement. Les technologies de pointe sont en effet apparues, dont des « Meka », une nouvelle génération de tanks blindés et gérés par une informatique de pointe. De fait, des mercenaires aux pédigrées divers sont enrôlés, parfois à la va-vite… car ceux-ci n’œuvrent pas toujours dans les intérêts de leurs employeurs officiels. Dans ce contexte, l’américain Gyger, de la société Dark Sky, négocie ses services avec le colonel Djovanovitch, de l’armée régulière. Son but : intercepter sur le pont de Novi Sad une transaction de Mekas entre le trafiquant Andrew Vareck et le leader indépendantiste Kopanny. Au même moment, la sénatrice Sarah McCarty profite d’un talk-show politique sur toutes les chaines de télé américaines pour faire sa promo en vue de son élection prochaine. Elle vient de gagner les primaires démocrates et met un point d’honneur à investir les forces de son pays dans le conflit serbe, afin de rétablir la paix mondiale…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette nouvelle série d’anticipation et de guerre se montre « esthétique », mais un chouïa obscure dans les enjeux qui en composent la trame narrative. A grands renforts de brèves de presse, une double planche de garde retrace d’emblée le contexte géopolitique : c’est la guerre en Serbie et les intérêts militaires mondiaux sont puissants quoique nébuleux. Malgré de nombreux renvois en bas de page, ce flou géopolitique ne nous quittera jamais durant tout ce premier tome, où l’on peine en permanence à distinguer qui roule pour qui, et pour y gagner quoi. Au scénario, Guillaume Dorison (frère de Xavier) a sans doute la « real-politik » dans sa ligne de mire ; dictée par les puissants, elle régit la plupart des conflits modernes. Cependant, ce propos ne reste encore qu’une intention, étouffée sous les explosions et le grand-spectacle de la guerre virile. Quasi chorégraphiées, les scènes d’action sont menées par un casting d’« acteurs » ténébreux et séduisants. La méthode infographique du studio collectif Elyum – qui s’occupe, dans un autre registre, des albums tirés de l’adaptation SF animée du Petit Prince – permet d’ajouter comme un grain cinématographique aux cases, particulièrement léchées… mais elle n’accorde guère d’empathie pour les personnages. La formule du morcellement des tâches aboutit aussi à un décalage de focale entre certains décors, brossés sous un flou artistique, et les personnages, plaqués là détaillés et minutieux. Le scénario s’axe aussi sur les armements de pointe qui, en 2020 (soit dans 8 ans), ont connu un développement surréaliste. Visuellement, les « Meka », ces tanks révolutionnaires, sont en effet plus proches des robots transformers manga-designés que de toute technologie probable. L’un des dessinateurs, Jean-Baptiste Hostache, connait bien le sujet, lui qui a débuté avec Clockwerx. Muselés toutefois par un simple virus, ces mékas ne font guère montre de leurs capacités pour le moment. Bref, un tome 2 sera bien utile pour clarifier pas mal de petits points nébuleux et faire aboutir la série sur autre chose qu’un déferlement de scènes de guerre.