L'histoire :
En 1968, une enfant de 11 ans, Mary Bell, est condamné à perpétuité pour le meurtre de deux garçons de 3 et 4 ans. Ce qui choque la journaliste Gitta Sereny dans ce procès expéditif, c'est l'absence de recherche concernant les raisons qui ont poussé une enfant à perpétrer ses actes monstrueux. Car si Mary est bel et bien coupable, personne ne cherche le « pourquoi » dans ces événements qui ont choqué toute la Grande-Bretagne. Et pourtant, il y a des choses à dire sur la vie de cette jeune fille, enfant d'une prostituée souvent absente et qui cherche constamment à se débarrasser d'elle. Que ce soit en tentant de l'offrir au premier couple venue ou en essayant de l'éliminer, Betty n'a de cesse de rejeter cet enfant qu'elle refusait déjà dès sa mise au monde... Dans un livre polémique, la journaliste décide donc de relater l'environnement et les conditions qui ont poussé Mary à passer à l'acte en recoupant témoignages de voisins et de policiers. Et 27 ans après ces actes odieux, Mary accepte d'être interrogé par Gitta dans le cadre d'un nouveau livre racontant son vécu, de sa jeune enfance jusqu'à son incarcération, en passant par ses crimes. Terrifiée toute sa vie par sa mère, Mary semble se libérer suite à la mort récente de cette dernière...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En pleine recherche pour sa série à l'humour noir sur les psychopathes célèbres publié dans le magazine Fluide glacial, Théa Rojzman (Grand silence, Billie Bang Bang...) s'étonne de ne pas trouver de cas concernant des femmes. En approfondissant, la scénariste ne trouve pas une femme mais une fillette seulement âgé de 11 ans ayant assassiné deux garçons plus jeunes qu'elle. En découvrant l'histoire sombre de cette fillette et la journaliste qui s'y est intéressée de près, Théa ressent l'envie d'adapter ce fait réel dans une bande dessinée. Bien sûr, le récit est sérieux et sans humour, quel qu'il soit. Mêlant flashbacks, événements présents et onirisme, la scénariste propose un passionnant album de plus de 110 pages. Sombre et dur, avec un climax aux pages 101 et 102, lors duquel on retrouve les événements crus écrits en blanc sur fond noir, l'histoire n'est pas à mettre entre toutes les mains. Cela reste cependant très intéressant et parfaitement bien écrit, via un récit qui oscille entre psychanalyse et « narration sous psychotropes », sans jamais basculer dans le pathos ou le mauvais goût. L'italienne Vanessa Belardo met en images ce roman graphique. Pour sa première BD « française », l'illustratrice propose un dessin très immersif, dans lequel les couleurs retranscrivent parfaitement les ambiances. Les protagonistes montrent une vraie présence scénique. Le découpage et la mise en page sont parfaitement réalisés et ne perdent jamais le lecteur, malgré les changements d'époque et/ou de narration. On conseillera tout de même aux âmes sensibles de passer leur chemin. Il passeront alors à côté d'un album magistralement exécuté, à recommander à tous les autres.