L'histoire :
Dans un cimetière pour animaux, soudain, une patte surgit de dessous la terre, au niveau de la tombe d’un caniche appelé Puppy. Dans la peine, l’animal s’extrait ainsi entièrement de sa tombe, sous une forme putride qui ne le satisfait guère. Il s’ébroue, gratte le sol et se roule dans la poussière, jusqu’à se débarrasser des parties organiques inutiles… Il renait ainsi sous la forme d’une « sorte de chien » dynamique et curieux. Il regarde alentours où il se trouve et s’affaire aussitôt à pisser sur toutes les tombes de son entourage. Son image en médaillon sur sa propre tombe lui donne envie de déféquer… mais tel un constipé, il y parvient au terme de gros efforts. Curieusement, ce qui sort de son trou de balle, c’est un os. Il joue avec, le ronge, l’avale. Aussitôt, il défèque un autre os, plus petit, qui rebondit dans une rivière attenante. Merdouille, son os lui manque, maintenant. Alors il joue avec sa queue. Cela l’énerve tant et si bien, qu’il « se mélange » : le voilà avec la tête à la place du cul. En voulant tout remettre à l’endroit, il en perd la tête. Celle-ci rebondit jusque sur la tombe rococo d’une canichette…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Luz n’est décidément pas un auteur comme les autres. Après sa Catharsis post-attentats de Charlie, le survivant prouve avec cet album à la fois son immense liberté créative et artistique. D’où provient donc l’inspiration pour les aventures de ce chien zombie Puppy ? Certains psychanalystes la rattacheraient à sa nécessaire catharsis morbide… mais nous ne sommes pas qualifiés pour l’attester. Que cherchent ensuite à dire la suite iconoclaste de péripéties à laquelle il s’adonne, en suivant juste un instinct de curiosité tout à fait logique pour la race canine ? Il chie, s’excite, perd la tête, subit divers artefacts de notre société de consommation, ou joue de manière absurde avec des éléments symboliques et poétiques complètement barrés (les colonnes de cristaux de neige…). Là encore, une extrapolation influencée par l’œuvre de Luz sous l’ère Charlie consisterait à y voir une diatribe de notre société… mais rien n’est moins sûr. Ce qui semble en revanche plus clair, c’est l’impulsion « freeride » de ce bouquin, qui part sans doute dans des directions que l’auteur n’attendait pas lui-même. Muet, sans aucune bordure de case, Puppy se laisse porter par sa vie après sa mort, débarrassé de toute contrainte et de tout objectif, dans un dynamisme fou. Tantôt minimaliste et jeté, le dessin débridé montre aussi par moments que Luz est très talentueux. Comme le prouve cet incroyable plan sur une grosse et vieille femme invisible qui traverse la rue, cadré en plongée verticale sur l’intérieur de ses vêtements. Complètement barré… mais génial !