L'histoire :
A Tripoli, le 10 mai 1801, le Pacha Yusuf Ben Ahmed Sidi Ali Karamanli reçoit dans son palais le consul américain Cathcart. Yusuf s’impatiente car il attend les dons promis par l’Amérique : l’argent et les mousquets. Cependant, le consul n’a que des barils de poudre à lui offrir pour l’instant. L’éminence turque est furieuse et demande des comptes. Mais le consul ne se laisse pas faire : le ton monte très rapidement. Yusuf, fou de rage, décrète alors que le traité entre les deux pays est rompu. Tant que l’Amérique ne donne pas ce qu’il doit à Tripoli, les forces ottomanes captureront les navires américains et feront des étrangers des esclaves de son pays. Pourtant, le royaume est fragile. En effet, le prince Hamet Karamanli est normalement le vrai roi de Tripoli ; son frère l’a chassé de la ville et a pris sa propre famille en otage. Il s’organise alors pour renverser le tyran. Réfugié en Egypte, Hamet doit faire face aux tueurs de Yusuf qui veulent éliminer le gêneur. Les Etats-Unis décident de s’allier au prince pour renverser la ville…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les éditions Glénat reviennent sur un événement historique américain quelque peu oublié : l’intervention des USA aux début du XIXème siècle, dans une de ses possessions africaines aujourd'hui capitale de la Lybie. D'origines marocaines, Youssef Daoudi s’applique à présenter la situation dans ce pays en 1801, avant que les tensions diplomatiques s’intensifient jusqu’à exploser. De subtile façon, il nous montre tous les rouages du pouvoir américain qui veut intervenir sans faire de vagues. Comme dans un jeu d’échecs, les forces en présence avancent petit à petit leurs pions. Yusuf est certes une caricature du tyran sanguinaire et amoral, mais la vision des Etats-Unis est loin d’être manichéenne. Les sénateurs et autre président jouent de leurs influences dans leur propre intérêt, en oubliant l’humain… des années avant l’impérialisme du modèle américain actuel dans le monde. L’album traîne toutefois un peu en longueur et l’arrivée des forces armées à Tripoli se fait attendre pendant tout l’opus. L’auteur se garde le récit de la bataille de la ville dans le deuxième épisode à venir. Cependant, c’est la force graphique qui interpelle le plus dans ce récit. Daoudi offre une prestation magnifique et reconstitue à la perfection la beauté du désert, la noblesse des soldats berbères et la fierté des troupes occidentales. Les costumes sont travaillés ainsi que les décors, fruits d’une véritable recherche documentaire. On a l’impression de revivre certaines scènes du film Lawrence d’Arabie ! Dans un alliage très efficace de couleurs modernes et de respect de l’histoire, Daoudi emprunte par moment le trait hachuré et détaillé de Jean Giraud et la colorisation de Christian Rossi – deux maîtres qui ont influencé son art. Cette épopée prenante et originale met en lumière les pays d‘Afrique du Nord d’une fort belle manière.