L'histoire :
Giacomo erre dans les rues de la grande ville, à la recherche d'un amour imaginaire. Lui qui aime tant les croissants ne pourra s'en payer qu'un, car il ne lui reste plus qu'1,40€ en poche. A moins que ce ne fut hier ? D'ailleurs, comment en est-il arrivé à ce dilemme ? « Pas une seule fois dans ma vie je n’ai emprunté d’argent, mais c’est peut-être parce que je n’ai que vingt-trois ans. Il reste du temps, je peux encore apprendre ». Il se rappelle le souvenir d'une amie qui, petite, trouvait chaque matin une pièce d'or sous son oreiller, parce qu'elle avait mangé le cœur d'un oiseau d'or. Et le soleil se couche. « Le soleil couchant est une chose qu’il faut apprécier telle qu’elle est ».
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Certes, on est attiré par les couleurs chaudes faites de pixels et d'aplats se répartissant de manière uniforme et aérée au sein des pages de ce bel album au format à l'italienne. Cependant, la narration étonnante dont fait preuve l'auteur italien nous embarque rapidement dans ses élucubrations psychiques, lui faisant poursuivre une chimère, tantôt une belle femme, que jamais il n'aura, tantôt quelque argent, qu'il semble avoir déjà perdu. Le choix de Giacomo Nanni d'écrire ses textes à côté de cases colorées, sans dialogue, participe de ce mouvement de va-et-vient, et du sentiment paradoxal ressenti entre ce qui est dit et ce qui est montré. Est-ce de la bande dessinée ? Une certaine forme en tous cas. Là-dessus se rajoute l'idée du découpage en trois temporalités : hier, avant-hier et aujourd'hui, qui se confondent, au moins dans l'esprit du personnage principal et ajoute un aspect fantastique au récit. Le « je » du personnage étant l'auteur, celui-ci s'interrogeant sur des souvenirs, des regrets, mais surtout l'envie et le désir d'avancer, de rencontrer quelqu'un et surtout de pouvoir redevenir maître de son destin. Ce dernier est cependant lié à une contrainte financière très terre à terre. Comme l'avoue Giacomo, il aime presque autant les bons croissants que l'argent ; cela l'affectant au point de lui ruiner sa journée. Giacomo Nanni, découvert en 2008 aux éditions Cornélius et auteur de déjà 8 albums en France, se révèle être un très bon narrateur, bel observateur des choses de la vie. La prouesse avec laquelle il construit son récit introspectif, tant dans la forme que dans le fond, valide son talent. Il y a un peu de surréalisme dans Un jour un soir, mais surtout beaucoup d'amour de la vie et de tendresse. Normal, il y est question de cœur. « Ceci n'est pas une bande dessinée » aurait dit un fameux peintre en ironisant.