L'histoire :
En mars 1959, les indiens retrouvent un énième cadavre d’un membre de leur communauté dans le désert de l’Arizona, à proximité de la frontière mexicaine. A moitié bouffé par les charognards, le bide grand ouvert, le visage énucléé, le vieil homme est méconnaissable, mais les indiens identifient Long Cou. Le shérif Thompson de Red Creek et le détective Johnny Peccato se rendent sur place. Le shérif classe rapidement l’affaire : attaque de fauve. Peccato note bien que les notions du shérif sur la faune locale sont déplorables, mais il s’en fiche un peu. Lui enquête sur une série de disparitions au sein de différentes communautés. Le lendemain, une jeune femme reporter du Los Angeles Times arrive à Red Creek. Coupe de cheveux garçonne, mini short, grosse poitrine, elle se déplace en moto et veut faire un papier sur le meurtre dans la réserve indienne. Elle a auparavant fait un détour par le casse auto des frères Dalton, pour changer son rétroviseur… mais elle est tombée sur une fin de non-recevoir. Les Dalton cachent à l’évidence des affaires louches. Thompson accepte de boire une bière avec elle, mais il ne lui donne guère d’infos sur le cadavre, puisqu’il s’agit selon lui d’une simple attaque de fauve. C’est alors que l’adjoint du shérif Dewey déboule dans le snack : un autre cadavre vient d’être retrouvé, tout déchiqueté…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
« Red Creek », c’est le nom du patelin de ce désert de l’Arizona où, en cette année 1959, l’on retrouve des cadavres en piteux état. « Shuffle » donne une idée du « mélange » de genres qui viendra se greffer à ces meurtres que tentent d’élucider un shérif nul, une journaliste opiniâtre et un détective répondant au cliché classique du répertoire. Car en marge des cadavres éviscérés, décharnés, voire décapités, il y a aussi des disparitions inquiétantes. Un serial killer gravement dérangé serait-il à l’œuvre ? Pas forcément, quand on sait qu’à proximité, se trouve une base scientifique militaire, qu’on a récemment signalé un OVNI, qu’on est en pleine guerre froide avec des agents soviétiques dormants ! Alors, les responsables sont-ils des aliens, des espions, un serial-killer, une administration corrompue, des zombies ou… un joyeux bordel d’un peu tout ça ? En somme, Corbeyran a sans doute eu pas mal de boulot pour mettre de l’ordre dans les idées de la série B de Chico Pacheco. L’intention première de Pacheco, qui s’est créé ici une partition sur mesure pour son chouette dessin semi-réaliste, son découpage et ses cadrages dymaniques, est l’hommage croisé aux codes du thriller dans les sixties américaines. D’ailleurs, la construction narrative en chapitres (comme autant de périodiques réunis) et le format plus vertical que le franco-belge, lorgnent volontiers vers les comics. Les clins d’œil pullulent, comme le rappelle Pacheco en postface : à Torpedo au travers du personnage du détective Peccato, mais aussi à Lucky Luke avec les frères Dalton (de différentes tailles). Et ce sacré scénariste parvient admirablement à nous accrocher, en distillant des intrigues croisées dans une solution aqueuse de dialogues régulièrement hors-sujets (façon Tarantino). En revanche, ce qui est plus déplorable de la part de l’éditeur, c’est la quantité rarement égalée de fautes d’orthographe laissées dans la version publiée dans le commerce.