L'histoire :
Après l'Afghanistan, Nicolas part en Iran sur les traces de l'une des plus anciennes religions monothéistes du monde, le zoroastrisme. Zarathoustra, titre évocateur d'un livre de philosophie bien connu, mais jamais lu, pour les uns ; culture millénaire pour les autres. Et au centre Cyrus Yazdani, figure emblématique de la culture zoroastrienne en Iran, retrouvé assassiné en Suisse pour d'obscures raisons... Un meurtre commis d'ailleurs après une vague d'assassinats ayant touché les leaders zoroastriens qui s'étaient attirés les foudres de la République islamique. En février 2009 a lieu, à Genève, le procès brumeux du présumé coupable du meurtre de Cyrus. Auparavant, Nicolas, en compagnie de Sophia, la fille de Cyrus, s'est rendu en Iran sur ses traces pour tenter de comprendre le personnage, avec en point d'orgue l'inauguration du centre culturel zoroastrien voulu par Cyrus quand il était en vie. Entre enquête, espionnage, carnet intime et quête de justice qui déterre les non-dits ou éclaircit les zones d'ombre, le portrait d'une culture fabuleuse mais ignorée...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans Ainsi se tut Zarathoustra, le lecteur retrouvera tous les atouts qui ont fait le charme de la série Kaboul Disco : finesse, intelligence, humour léger, sens de l'observation aigu, loin de toute leçon de morale mal placé, et avec ce don de marier habilement fluidité narrative et documentation précise, légèreté apparente du ton et sérieux ou rigueur de l'approche. Dans le présent one-shot, l'auteur Nicolas Wild nous fait voyager à rebours de tous les clichés ronflants collés à l'Iran actuelle en nous plongeant dans son Histoire mouvementée et ses magnifiques paysages. L'idée : se pencher sur la religion zoroastrienne, ici prétexte narratif à un formidable voyage dans la culture iranienne entre la BD-reportage, le carnet intime et le film d'espionnage. Nicolas Wild nous emmène dans son périple oriental au rythme d'une divagation rafraîchissante via l'histoire passionnante de son personnage principal très attachant, Cyrus, humaniste tolérant au franc-parler qui trouva une mort tragique après une vie de lutte pour faire reconnaître sa religion et ses valeurs. L'auteur fait des choix narratifs judicieux : malgré sa densité, un récit éclaté et rythmé qui multiplie les allers-retours entre passé et présent sans perdre le lecteur, balancé entre l'expérience personnelle de l'auteur, la vie de Cyrus et le procès de son meurtrier. L'occasion aussi de faire découvrir une religion, un pays et ses peuples qui le composent, patchwork de langues et de nationalités. Il dresse aussi le tableau politique de l'Iran actuelle avec une surprenante lucidité, en montrant ses problématiques (immigration, statut des minorités, absence de liberté d'expression) sans prendre parti. Plus drôle et informatif que les BD de Guy Delisle, le récit de Wild réussit à instruire et divertir avec un mélange étonnant de distance, d’auto-dérision et d'empathie. En termes de dessin, il livre de magnifiques planches fourmillant de détails, notamment dans les décors orientaux. D'une religion ignorée, bafouée ou mal connue, Wild parvient à en faire le prétexte à une peinture à la fois inspirée et émouvante où l'auteur se fait brillant pédagogue et la BD, magnifique outil de transmission. Ni une autobiographie, ni un reportage, pas tout à fait un récit d'aventure non plus, mais patchwork subtil parfaitement maîtrisé entre l'enquête et le récit de voyage, Ainsi se tut Zarathoustra se referme avec un spleen de circonstance. Une belle surprise et une nouvelle réussite pour Nicolas Wild !