L'histoire :
Louise a hérité des affaires de son père. Parmi elles, un trophée de chasse légué par un ami cambodgien, officier vietnamien qui a connu l’invasion du Cambodge et la prise de Phnom Penh. En grand besoin financier, Louise charge Simon de le vendre dans une salle d'enchères à Paris. Une vente aux enchères de trophées de chasse a justement lieu une semaine plus tard. De nombreuses babioles partent alors à quelques centaines d'euros, des têtes de tigre ou des défenses en ivoire. Mais tout à coup, contre toute attente, le massacre de buffle sauvage de Louise va déclencher une surenchère. Toute la salle assiste incrédule à un duel surréaliste : les prix montent jusqu'au million pour acquérir ce qui ressemble à des cornes de kouprey datant de 1933, un animal mythique du Cambodge qui n'existerait plus... Finalement, c'est le collectionneur Limul Goma qui remporte l'enchère, au prix d'un combat farouche et d'une somme faramineuse. Mais quelle valeur peut bien avoir la tête d'une bête morte ? L'histoire d'un tir au fusil qui a changé l'histoire d'un pays... Ou l'histoire d'un collectionneur bien informé...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Simon Hureau inscrit son récit dans un contexte original, celui de Limul Goma, mystérieux collectionneur d'objets anciens, qui achète à prix d'or le massacre (trophée de chasse) d'un kouprey, sorte de gros buffle mythique cambodgien aujourd'hui disparu. Tout l'enjeu est de savoir pourquoi et de comprendre le lien entre ce trophée – en apparence insignifiant – et la valeur que certains lui attribuent. De là, l'auteur tisse une enquête historique qui emmènera le lecteur dans les confins de la jungle d'Indochine, entre les temples d'Angkor et les animaux sauvages. Et par petites touches, rattache son intrigue à l'Histoire du Cambodge et au massacre perpétré par les Khmers Rouges entre 1975 et 1979. Très bien vu, comme le titre, un jeu de mots à double sens et à l'ironie certaine. A l'appui d'une bonne documentation, mais sans jamais trop en faire, l'auteur ménage surprises et rebondissements avec malice et nous tient en haleine facilement. On pourra juste regretter le message un chouya manichéen, mettant face à face une nature authentique idéalisée (incarnée par le buffle disparu) et une nature humaine ici mauvaise incarnée par Pol Pot. Mais par son originalité, sa manière d'installer décors et personnages criants de vérité, son sens de l'intrigue farfelue bien réglé, Hureau réalise un récit naturaliste et fantaisiste, exotique et efficace, souvent intrigant, croisant petite et grande Histoire, fiction et réalité, porté par une narration plaisante. En une sorte d'hommage aux victimes des années rouges. Et peut-être, cette intrigue vous donnera-t-elle aussi l'envie d'en savoir un peu plus sur l'effrayant Pol Pot et l'Histoire du Cambodge...