L'histoire :
1928 : Étudiant la médecine dans la capitale, Edmond rejoint, le temps des vacances, sa province et sa famille. Son père, lui-même médecin, le convie dès le lendemain de son arrivée à participer aux visites qu’il doit faire à ses patients. Le jeune homme s’en sort plutôt pas mal et doit même en urgence pratiquer une césarienne auprès d’une gitane. Quelques temps plus tard, pour le remercier, la communauté nomade, l’invite à festoyer. Loin de refuser, il participe à la fête, danse, boit, s’amuse et tombe sous le charme d’une jolie jeune fille au regard envoutant….
1971 : Pierre se réveille chez Olivier avec une sacrée gueule de bois. La veille, il a bu une mixture qui lui a fait tout oublier. C’est son copain qui l’a entrainé dans ce piège. Pourtant en rencontrant, dans la maison familiale, Clarisse, la sœur du traitre en question, il ne tarde pas à tout lui pardonner : la belle à des atouts auxquels il ne tarde pas à goûter. En plus, Olivier lui trouve du boulot. Pierre s’occupe ainsi d’une vieille femme paraplégique, avec laquelle il lie peu à peu à peu une solide amitié.
Mais, qu’ils prennent racine en 28 ou 71, les bonheurs sont éphémères et le drame ne tardent jamais à les balayer…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
1928 et 1971… Un jeune médecin amoureux d’une belle gitane… Un pauvre bougre manipulé par une teigne pour soutirer son magot à une vielle femme handicapée… Voilà qui alimente, dans un bel effort de mise en scène, un récit nourri par deux histoires distantes de quelques 40 années. A la manière d’un Frank Giroud nous délivrant quelques Secrets, Christophe et Sandrine Bon utilisent, ici, les arcanes noueux de la famille pour planter une intrigue dont la tension dramatique monte crescendo. Ainsi, l’entrelacs des deux fils narratifs nous conduira à comprendre peu à peu ce qui lie tous les protagonistes. Au final, c’est peut-être l’histoire d’une seule et même personne qui est évoquée à travers ces deux drames : l’un libérateur ; l’autre briseur de vie… A la lecture de l’ouvrage, on sent toute l’attention qui a été apportée pour bien raconter. Force est de reconnaitre que ça fonctionne plutôt bien. Car, en effet, si la trame principale se révèle assez basique ou si les « surprises » ne font pas sursauter, chaque révélation qui balise l’intrigue est bien amenée. En outre, on s’attache assez facilement aux personnages (la mémé taiseuse, le médecin pétri d’humanité, le gamin manipulé, l’énergumène et son mélange fortement alcoolisé…) quand bien même les informations délivrées sur chacun sont plus que discrètes. C’est là une belle manière de prouver que « le jeu de caméra » opérée par la mise en scène, via des cadrages donnant beaucoup de force aux protagonistes, a copieusement fait son boulot. On notera que chaque époque dispose de sa propre colorisation : douce et teintée de gris pour la plus ancienne ; vive et moins à l’aise avec le trait expressif pour la plus récente. En tous cas : parfaitement adaptée aux intentions du récit de nous faire balancer entre douceur, tendresse, violence et infecte méchanceté.