L'histoire :
Mai 68 vient de mettre un grand coup dans la France du Général. Fabienne a 17 ans et elle est en Première. C'est aussi une des premières à se mettre en grève et savoir qu'il faut rejoindre le mouvement des étudiants, puis celui des ouvriers. La jeunesse n'en peut plus du carcan dans lequel elle se sent enfermée. Ses parents sont assez ouverts d'esprit puisqu'ils la laissent partir vivre avec son copain, quand elle est en Terminale. Après son bac, Fabienne est une jeune femme qui vient d'être embauchée à l'usine Renault de Flins, comme ouvrière. Mais elle est surtout chargée d'une mission car elle est, ce qu'on appelle à l'époque, une « établie ». On dirait aujourd'hui qu'elle appartient au mouvement d'extrême gauche... Elle n'en démordra jamais, il faut plus de justice sociale. Et dans l'entreprise, en premier lieu, à qui on donne la plupart de son temps. Chez Renault, toute grille de salaire est figée. Alors en 1973, elle fait sa première grève d'ouvrière. Au lieu de la reconnaissance de technicien P1 et le salaire qui va avec, elle et ses collègues obtiennent 80 Francs de plus. 26 ouvriers licenciés lors d'affrontements avec la Direction et 200 lettres d'avertissement... Mais ça n'enlève rien à la cause, au contraire !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette BD est une adaptation du livre de Fabienne Lauret, qui a bossé 36 ans dans l'usine Renault de Flins. En revanche, de son propre aveu, elle ne connaissait pas grand chose à la BD. Mais elle y a tout de suite vu un beau vecteur de transmission de son engagement. Plus de 40 ans de militantisme, à défendre la condition des travailleurs, mais aussi des femmes, dans un milieu qui reflète aussi la dureté de la société, y compris sa phallocratie... Alors témoigner de son parcours, des obstacles qui l'ont jalonné et de l'énergie mobilisée pour les surpasser, c'est aujourd'hui ce qu'elle fait, maintenant qu'elle n'est plus « au front quotidien », dans l'usine... Voici donc une BD didactique qui, mine de rien, ressemble parfois au journal de la vie en usine dans les années 70. Philippe Guillaume a sûrement su traduire le récit autobiographique en terme de rythme, en mélangeant ce qui peut paraître à la limite du documentaire, avec ce qui ressort d'un récit de vie, celui d'une femme à l'énergie bienveillante. Elena Vieillard amène, quant à elle, le jus et la simplicité de son dessin, avec des teintes rouges dans son noir et blanc dont les traits évoquent aussi le dessin de presse. Venez donc découvrir l'envers de la vie comme elle était dans cette usine.