L'histoire :
En 2020, lors du second confinement, Samuel Marchadier est aide-soignant la nuit dans un hôpital. Le jour, il travaille sur sa nouvelle BD. Un coup de fil de sa chère et tendre le sort de son labeur. Elle a retrouvé ses vieilleries de l’armée et les a mises dans un carton, juste à côté de son bureau. Sam attrape le carton et, à la vue des objets qui tombent sur le plancher, tout lui revient en mémoire. Des galons, de vieilles photos, un béret bleu, une baïonnette… Jadis, lors de son service militaire, il a été engagé au sein d’un groupe de casques bleus de l’ONU, durant quelques mois d’hiver en Bosnie Herzégovine, alors en pleine guerre d’indépendance contre le voisin serbe. Il se souvient tout d'abord de ce mois de juin 1992, alors qu’il prenait le train avec sa tenue de skin-head néonazi, dans le même compartiment que d’autres natifs d’Agen. Les mecs étaient des « bicots » et pas de bol, ils étaient incorporés dans la même caserne que lui. Ne supportant pas leurs sourires en coin, Sam était descendu du train à Montauban, préférant attendre le suivant. Dans le bar où il avait bu quelques bières, le JT donnait des nouvelles du front en ex-Yougoslavie. Des obus avaient encore tué des civils à Sarajevo. Le chef de la diplomatie James Baker envisageait une nouvelle action internationale pour maintenir la paix. L’ONU s’acharnait à essayer de contrôler la situation…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour la seconde fois, après Mirador tête de mort , David Cenou revient sur sa jeunesse sulfureuse de skin-head néonazi. Il (re)précise bien en préface qu’il ne partage plus du tout les opinions délétères de l’époque et qu’il défend aujourd’hui de toutes autres valeurs. Comme l’indique le titre et sa baseline Un conscrit casque bleu, la période correspond à celle où il a effectué son service militaire au sein d’une force de maintien de la paix pour l’ONU, en 1992-1993. Le récit est donc autobiographique, mais Cénou utilise un autre nom pour se mettre en scène à la première personne, comme pour insister sur la renonciation de son passé de néonazi. On évoluera donc aux côtés d’un certain Sam Marchadier, originaire d’Agen, teigneux et bas du front, qui se retrouve à ne pas faire grand-chose sur le triple front de la Bosnie, de la Croatie et de la Serbie, durant un interminable hiver… sur plus de 315 pages ! On sent bien la volonté de l’auteur de coller au plus près de la réalité, de ne pas renier sa médiocre mentalité… mais quel triste quotidien ! La plupart du temps, ils glandent à leurs baraquements, manœuvrent à travers la campagne enneigée sans jamais tirer une seule balle, se regardent en chiens de faïence avec les locaux, trafiquent des clopes ou de l’alcool, ou se pourrissent la vie en confrontations racistes futiles. Malgré ses efforts de reconstitution documentaire, le dessin semi-réaliste encré n’est pas toujours régulier et il échoue souvent à distinguer les protagonistes. Les biffins en tenues militaires et aux cheveux ras se ressemblent tous et masquent tous leurs intentions (s’il y en a…) derrière leurs immatures regards de défiance et leurs idées courtes. Malheureusement, les rares séquences qui tentent de nous expliquer les tensions géopolitiques et pourraient nous apporter un éclairage sur cette guerre sont aussi rares que confuses.
