L'histoire :
Aussi loin qu'il s'en souvienne, Fabrice a toujours eu de gros problèmes de communication. Afin d'exorciser cette lacune sociale, il la formalise en historiettes de BD d'humour autobiographiques. Il situe notamment la première fois qu'il s'en est rendu compte à une anecdote vécue à l'âge de 7 ans. Sa mère lui avait alors confié sa première course, chez un commerçant de sa bourgade : acheter une baguette de pain. Cette fois-là, Fabrice avait bien enregistré la nature de la commission dans sa cervelle, mais il était incapable de savoir dans laquelle des deux boutiques qui s'offraient à lui, il lui fallait pénétrer. Pas de bol, il avait choisi la boucherie. D'une voix fluette, il avait demandé une baguette de pain... Le commerçant bourru l'avait fait répéter : « Quoi ? Un steak haché ? » Et Fabrice d'acquiesser, car trop timide pour contredire le boucher. En grommelant, ce dernier lui avait alors désépaissi un steak qui correspondait à la somme des deux francs que l'enfant lui avait présentés. Dès lors, les 23 années qui suivirent consistèrent à rapporter des steaks hachés des boulangeries. Ainsi, à son entrée en classe de 6ème, Fabrice s'était-il retrouvé dans un club théâtre alors qu'il voulait faire de la peinture sur verre. Ainsi, ses parents lui offrirent-ils un Lucky Luke à chacun de ses noëls jusqu'à un âge adulte avancé...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec ce Steak hache de Damoclès, Fabcaro inaugurait en 2005 sa griffe humoristique personnelle, mâtinée d'absurde et d'auto-dérision (plus ou moins) autobiographique. L'historiette introductive de ce recueil en précise clairement l'intention première : le médium bande dessinée sera un vecteur utile qui lui permettra de formaliser un problème social irrémédiablement ancré en lui : la communication avec autrui. Notons au passage que la BD est effectivement très souvent utilisée par les psychiatres et éducateurs spécialisés en tant qu'outil thérapeutique dans le genre. La différence avec les productions confidentielles qui en ressortent, est que Fabcaro dispose d'un réel sens de l'humour et de la construction du gag, qui fait vraiment poiler et mérite tout à fait d'être publié. Les éditions de la Cafetière se sont donc volontiers emparé de ce travail, pour un premier recueil souple et en noir et blanc (déjà réédité en 2008). Sans fausse pudeur et avec un naturel bienvenu, l'auteur nous explique donc que ses problèmes viennent de deux tares : premièrement, il est incapable de se concentrer longtemps sur une discussion. Le flot de paroles qui parviennent alors à ses oreilles ressemble vite à une logorrhée soporifique : Wouwouwou... Deuxièmement, il est bien trop timide pour l'avouer à ses interlocuteurs, ce qui donne lieu à d'insupportables malentendus. Durant l'enfance, les études, avec les filles, en milieu professionnel ou familial, sa lâcheté assumée semble être la source d'une infinité de situations absurdes franchement cocasses. Les amateurs (que nous sommes) peuvent se réjouir : Fabcaro a ensuite décliné ce premier opus en moult autres recueils...
