L'histoire :
L’agent Alpha est placé au cœur d’une affaire à hauts risques. En effet, un submersible russe cesse toute communication, le monde du renseignement s’affole. Alpha est aussitôt pris dans un courant d’événements qui le dépassent, initié par la disparition brutale d’une de ses informatrices. En cherchant à comprendre ce qui relie ces signaux dispersés, il se retrouve projeté au cœur d’un jeu dangereux où opèrent réseaux dormants, manipulations internationales et revenants du passé. Chaque piste qu’il suit renforce l’idée qu’un affrontement silencieux se prépare et que la plus grande menace pourrait provenir de ceux qui prétendent être ses alliés.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Emmanuel Herzet signe un nouveau thriller d’espionnage au cordeau, tendu comme un câble prêt à rompre. Il joue habilement avec les codes du genre : menaces invisibles, agents surgis du passé, loyautés qui se dérobent et, surtout, la disparition d’un sous-marin russe qui agit comme un trou noir narratif. L’effet est immédiat : tout ce qui entoure cette absence devient source de danger. Pour les aficionados de James Bond, difficile de ne pas sentir planer l’ombre de The Spy Who Loved Me, où la perte d’un submersible déclenche elle aussi une course mondiale contre l’inconnu. L’association vient naturellement, portée par la même tension, la même sensation que quelque chose d’immense se joue hors de portée du regard. Le récit se construit alors autour de trois dynamiques fortes qui se répondent sans cesse. D’abord celle de l’invisible, moteur essentiel de l’espionnage : un sous-marin volatilisé, un ennemi que l’on croyait mort, des indices trop maigres pour être rassurants. Vient ensuite la notion de loyautés fracturées, où chaque personnage semble avancer sur une ligne brisée, se méfiant des ordres comme des alliés. Enfin, Herzet inscrit son intrigue dans une guerre froide modernisée, faite d’intérêts russes, de crispations iraniennes et d’inquiétudes américaines. Le monde a changé, mais les réflexes de puissance, eux, demeurent. Graphiquement, Alain Queireix dynamise l’ensemble avec un trait réaliste et nerveux, qui capte la tension sans l’alourdir. Ses décors – salles des machines, bureaux feutrés, ruelles étouffantes – respirent l’authenticité et soutiennent la mécanique du récit. Les personnages sont expressifs, physiquement présents, taillés pour évoluer dans un univers où chaque geste compte. La mise en couleur d’Andrea Meloni apporte une froideur métallique : bleus profonds, gris acier, rouges d’urgence. Une ambiance parfaite pour un thriller qui ne laisse jamais retomber la pression. Le découpage, vif et maîtrisé, alterne scènes d’action soudaines et moments de silence chargés d’électricité. Les transitions tombent juste, renforçant une lecture fluide, presque cinématographique. Black Holes confirme ainsi le savoir-faire de la série Alpha : un espionnage crédible, précis et tendu, porté par un duo scénario-dessin qui respire la maîtrise. On referme l’album avec la sensation d’avoir nagé trop près des abysses – mais avec l’envie d’y replonger.
