L'histoire :
Au cœur d'une nuit marseillaise, l'homme qui sort des toilettes de la boîte de nuit est déterminé à agir. Un couteau à la ceinture, il se dirige vers un des caïds du lieu, un certain Roméo, assis à une table et entouré de jolies filles. Ce dernier le reçoit avec mépris, comptant sur ses gardes du corps pour mettre l'inconnu à la rue. Mais Talino n'est pas un jeune homme comme les autres. Il se débarrasse rapidement des gros bras qui voulaient l'immobiliser et emmène Roméo sous la contrainte. Talino est le frère cadet d'Anouar, qui est le boss de Roméo. Ils arrivent rapidement en voiture dans un des quartiers les plus dangereux de la ville, devant une barre d'immeubles où Anouar est censé habiter. Dans la tête de Talino, les souvenirs refont surface. La petite enfance au cœur d'un village africain, élevé avec son frère par un oncle ultra autoritaire. Les premières peurs au contact des animaux de la forêt et très rapidement la violence qui surgit sous forme d'une milice armée aux ordres du colonel Taylor. Anouar a été enrôlé et revient au village pour emporter avec lui les garçons du village. De la vie de milicien mercenaire aux quartiers de Marseille, Talino va connaître une entrée violente dans le monde des adultes.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C'est un album choc, violent et cru, que les auteurs Clément Baloup et Christophe Alliel proposent ici, sous une couverture remarquablement évocatrice. La plongée dans les pensées de Talino devant le miroir des toilettes de la boîte de nuit agit comme la première étape d'une immersion, qui ne prend fin que lorsque la dernière page est tournée. Le parcours initiatique d'un jeune enfant africain confronté dès son plus jeune âge à la violence du monde est montré sans concession. Sans une once de bons sentiments, cet album agit comme une gifle de réalité crue. Qu'ils concernent les jeunes de la banlieue marseillaise, les enfants africains utilisés dans des combats qui ne sont pas les leurs, ou des journalistes blancs au cœur des conflits, les événements n'épargnent personne. Sans citer précisément les lieux, les auteurs construisent une trajectoire qui évoque les conflits au sein de pays africains ballottés par des coups d'état, aussi bien que les luttes urbaines de milices armées dans le nord du continent. L'album n'est pourtant aucunement un récit journalistique, mais réellement la parcours personnel d'un enfant qui se découvre au cœur des événements. Une expérience intime au milieu de la violence, que le lecteur n'est jamais appelé à juger. C'est une grande force de ce Ventre de la Hyène, dont la mise en images ultra dynamique et techniquement fouillée impressionne également. Un récit mûr, exigeant et prenant.