L'histoire :
A fond sur ses rollers, Yann défile à vitesse grand V. Dans les rues de la ville, il rejoint son pote Luis pour une après midi délire. Le lycée, ce sera dans une prochaine vie. Au détour d’une rue, la grosse surprise : Yann aperçoit sa mère au bras d’un inconnu. Pas d’ambiguïté possible, il s’agit bien d’un amant. Et même si Luis tente de le convaincre que le divorce n’est pas la fin du monde (la preuve : on y gagne même une seconde maison), Yann encaisse le choc difficilement. La haine lui remue les tripes et seule une virée sur 6 roues parvient à le calmer. De retour au domicile, il retrouve sa grande sœur qui se farde pour une excursion nocturne. Il se propose de l’accompagner. Elle est d’accord si son cadet finance, lui même, sa sortie. No problem… Yann fonce récupérer la monnaie mais découvre que le petit frère a abondamment plongé la main dans ses économies : on réglera les comptes bientôt ! Pour l’instant, c’est sa mère qui lui en demande, mais l’ado fait la sourde oreille, ce n’est sûrement pas elle qui peut lui faire la leçon. En quittant la maison, les 2 aînés laissent leurs parents à leurs querelles alimentées par l’alcool, le chômage et la violence. Le petit dernier, Lucas, se met tout sur le dos. Le sommeil est alors plus que difficile, d’autant qu’un secret l’oppresse : il est, depuis plusieurs semaines, victime d’un racket au lycée. En boîte, pour Yann, c’est l’éclate with music et ecstasy jusqu’au bout de la nuit. A 6 plombes du mat’, le jeune rebelle et son pote Luis prennent une grande décision : ils deviendront les stars du roller. Mais pour mener à bien ce projet, il faut un maximum d’argent. Se faire un vieux au distributeur semble LA solution…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
À l’opposé de ses productions traditionnelles, Derib signe avec No Limits un 3e ouvrage ayant pour sujet central l’adolescence. Après avoir abordé le SIDA dans Jo et évoqué la prostitution dans l’album Pour toi Sandra, il utilise le parcours de Yann pour relater le mal-être adolescent qui conduit souvent à tous les excès, avec parfois un impossible retour à la case départ. Ce projet s’inscrit dans une démarche globale qui se veut informative, préventive et pédagogique. C’est même une Fondation suisse, dont ce dessinateur est le Président, qui a piloté le projet. L’objectif étant de diffuser largement ce support auprès du public concerné pour provoquer les débats, les rencontres et pourquoi pas éviter à certains les dérives. Pour jouer les pédagogues, l’artiste s’est entouré de professionnels compétents qui ont l’habitude de la problématique en question : pédopsychiatre, éducateur de la prévention pour la jeunesse, policier, directeur d'école, médiateur scolaire… bref, un vrai challenge socio-éducatif. Le résultat se délie sur 80 planches et offre un panel exhaustif des difficultés : divorce, violence, alcool, drogue, racisme, échec scolaire, dépassement de soi… On peut cependant regretter que malgré cette somme de bonnes intentions et de travail monstrueux en amont, on assiste à une accumulation de clichés sur l’adolescence qui ne crée pas réellement la surprise, l’étincelle attendue. Il manque un peu de ce relief qui accroche instantanément. Mais rappelons-nous l’objectif recherché : informer, anticiper, parler. Graphiquement, Derib livre un travail des plus honnêtes et parfaitement documenté. Certains de ses personnages existent réellement, ce qui confère à nouveau à la BD un coté : « Tout ça existe vraiment ! ». Pas un ouvrage révolutionnaire mais qui, s’il permettait un échange avec les ados, aurait rempli sa mission…