L'histoire :
Mère, frère, frangine, vieux copains du foot, femme et enfants…Tous sont là pour admirer les peintures d’Olivier. C’est le jour du « vernissage » de son exposition. Il ne manque personne. A moins que ce coup de tonnerre brutal et cette soudaine coupure d’électricité ne rappelle, au souvenir d’Olivier, un absent… Car elles sont loin ces odeurs d’enfance. Celles pleines de peintures, de colles pour les moquettes, de poussières et de transpiration. Celles où le petit gamin qu’il était, avait le privilège d’aller jouer les bricoleurs avec son papa. Ces matinées pendant lesquelles, il regardait son père s’affairer, où il sentait son regard fier se poser sur lui. Il s’en souvient parfaitement. Ces moments passés seul avec lui, quand il allait jouer au foot et où il faisait tout sur le terrain pour attirer son attention. Seul avec lui, mais jamais pour longtemps. Foot ou bricolage, son père finissait toujours par rejoindre une inconnue. Escapade qu’il achetait toujours par un joli sourire et un petit cadeau… Aujourd’hui, Olivier est père à son tour, mais il a décidé depuis quelques années de ne plus parler au sien.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Prologue, épilogue, composition graphique séduisante et originale, pas moins de 80 planches… Pour sa première BD, Olivier Mariotti se raconte. Et il le fait avec grand soin. Pas d’insupportable drame à rejouer, pour autant, pas d’invitation à compatir à quoi que ce soit non plus. Mais plutôt, de l’émotion distillée par touches, entre présent et passé, entre le pourquoi d’une rupture entre un père et son fils, culpabilité et propre construction. Avec beaucoup de pudeur et une vraie science de taiseux (le personnage livre ses sentiments sur une ou deux planches en fin d’album), Olivier Mariotti met dans la balance un présent baigné par une famille sereine, aimante, et celle de son enfance déchirée, petit à petit, par le mensonge. Au fil du récit, malgré son sourire affiché, son calme et son apparente plénitude, c’est un cri d’une violence inouïe que jette son personnage à la face de son papa. De cette complicité malsaine, indéfectiblement liée à des souvenirs également heureux, à cette impossibilité (organisée par son père) de pouvoir l’admirer, on sent que ce sont ses propres rapports avec ses fils qui sont en jeu. Pour ce qui est de la manière de faire, c’est impeccable de bout en bout. Outre son élégance, le dessin mène réellement la baguette de bout en bout. Olivier Mariotti lui confie bien souvent la charge émotionnelle du récit tandis que textes et dialogues sont eux plus souvent là, à l’inverse, pour alléger le propos. L’utilisation moderne du gaufrier (découpage de la planche en petites cases de même format ici souvent utilisé comme une sorte de puzzle) est judicieuse, la mise en couleur (made in son frère Guillaume) subtile et parfait métronome. Le choix d’un style de dessin quelque peu divergent (ça change du noir et blanc habituel) pour les flashbacks est une très bonne idée, qui plus est, car il accentue souvent la force « dramatique » du souvenir. Infiniment touchant et bien réalisé : à ne pas manquer.