L'histoire :
Il y a le Professeur Rotwang, un savant ingénieux, créateur des machines qui ont fait la puissance de l’énorme cité. La ville, c’est lui qui l’a conçue, pour le maitre des lieux. En échange, il n’a récolté que trahison, en se voyant dépouillé de sa femme à jamais. Mais bientôt sa vengeance viendra… Il y a les ouvriers, rats de la mégapole, sang des machines, qui s’agglutinent dans les bas-fonds… Il y a aussi Joh Fredersen qui, du haut de sa tour de New Babel, règne sur Metropolis. Avec ses proches amis, il est certain de construire le meilleur des mondes. Joh a un fils : Freder, jeune, beau et athlétique à souhait… Enfin, il y a ce petit grain de sable qui s’immisce fort à propos dans l’Histoire de la Cité et qui porte le doux visage de Maria. Le jeune homme en tombe, dès le premier regard, éperdument amoureux. Il la veut. Mais Maria est de basse condition et elle doit donc regagner la ville-usine dans les catacombes. Usant d’un stratagème, Freder décide alors de la retrouver, participant même au dur labeur des ouvriers. Le soir, il suit ses compagnons d’infortune dans un étrange lieu de réunion. Là, il retrouve la belle jeune femme qu’il recherche. Sa belle est en train d’exhorter la foule à se libérer de sa vile condition…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En adaptant sur 60 pages le cultissime film de Fritz Lang (Metropolis, 1927) en bande dessinée, Christophe Girard s’attaque ici à un projet ambitieux. L’œuvre du réalisateur autrichien est en effet reconnue pour avoir nourri nombre de projets artistiques et en particulier alimentée la science fiction à gogo. Prenons ici le parti de ne pas faire le jeu des comparaisons ou à vérifier si fidélité totale à l’œuvre originelle il y a (mais si ça peut vous rassurez, la trame générale de « l’intrigue » est respectée). Essayons plutôt de voir comment le récit, dénué de toutes ces connexions, agit… Laissons-nous emporter, alors, par ces judicieux contrastes de noir et blanc, dans cet univers où ville haute et ville basse sont aux commissures de l’inévitable confrontation… Une cité hors du temps, donc. Une ville sur laquelle règne un puissant et son aristocratie. Et puis, une populace ouvrière asservie qui fait tourner la machine, un savant fou épris de vengeance, un fiston amoureux et une belle qui veut que basse couche et richards fassent copains… Enfin, des manigances, le jeu du destin et l’explosion aux parfums de drame et de révolution… Tout ça est empli d’une démesure jubilatoire habile à faire le portrait de nos sociétés actuelles et passées (XXe et XXIe siècle) avec leurs dictatures, leurs volontés émancipatrices, leurs égocentrismes, indécences et inhumanités. Un bel exercice aux multiples et judicieuses métaphores, mais qu’on trouvera au final un peu court et vite lu. On regrette alors que, d’une manière ou d’une autre, tout cela n’ait pas été un peu plus grattouillé. Peut-être l’auteur a-t-il voulu coller le plus possible à son modèle, sans oser s’aventurer à l’exercice de l’appropriation en une formule revisitée ? Servi par un trait particulièrement porteur d’ambiance, l’ensemble donne en tous cas envie d’aller dénicher le DVD.