L'histoire :
Nell Pickerell nait en 1882 et accompagne ses parents dans le Klondike, où ils cherchent de l’or. Hélas, son père tabasse sa mère, qui se réfugie dans l’alcool. Née avec un sexe féminin, Nell se sent garçon et elle se fait passer pour tel. Elle se fait appeler Harry Allen, s’habille en garçon et agit en garçon. Son ambivalence sexuelle se fait repérer dans le campement des prospecteurs, alors même que ses copains l’invitent à reluquer par une tente déchirée une catin qui empile les clients. Vers l’âge de 15 ou 16 ans, elle est confiée par sa mère à une riche famille de Seattle, afin d’y servir en tant que femme de chambre. Iel porte alors une robe et les cheveux longs, ce qu’elle déteste. Elle se retrouve rapidement à partager la couche de Joséphine, l’autre bonne qui officie avec elle. Car Harry couche aussi bien avec les hommes qu’avec des femmes. Mais Joséphine couche aussi avec le maître d’hôtel et se refuse à être une invertie, malgré l’amour qu’elle voue à Nell/Harry. Un jour Joséphine se suicide et laisse un courrier qui responsabilise Harry. Iel gagne alors sa vie en tant que dancing boy. Quand les policiers l’interrogent, iel n’en a rien à foutre. D’autres femmes se suicideront pour iel, dans des circonstances similaires…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Nell Pickerell alias Harry Allen est connu comme étant l’un des premiers authentiques transgenres. Ça se passe à la fin du XIXème siècle dans le Nord Ouest des USA (Alaska et Seattle), c’est-à-dire au temps des cow-boys. Le scénariste Stéphane Tamaillon retrace la vie relativement courte de ce curieux personnage peu recommandable : iel est mort à 40 ans, avec un casier judiciaire long comme le transcontinental américain. Escroc, bandit de grand chemin, voleur de chevaux, proxénète, trafiquant d’alcool, empoisonneur… Iel fut même boxeur, avec son petit succès. Iel fut aussi poignardé par son propre père… après qu’il a tabassé sa mère… qui est morte d’alcoolémie… Bonjour la famille de cassos ! Malgré l’empreinte peu vertueuse qu’il laisse de sa personnalité, iel devait tout de même avoir son charme, car trois femmes se suicideront par amour pour lui. Sous prétexte d’une interview donnée au Seattle Times en 1919, qu’on retrouve en interludes réguliers de bichromie sépia, les séquences biographiques s’enchainent dans un désordre plus ou moins chronologique. Afin de ne pas trop extrapoler, les séquences qui recourent à l’imagination fictionnelle sont souvent dénuées de dialogues. Priscilla Horviller dessine cette « biographie » avec une griffe semi-réaliste souple et expressive.