L'histoire :
Dans le Wyoming, un homme avance péniblement dans la forêt blanche de neige. Son cheval est nerveux, c’est le moment de rester sur ses gardes. Dans les fourrés, une femme le guette et le voit découvrir le piège qu’elle lui avait tendu. Elle ne veut pas d’intrus sur son territoire, même un trappeur qui semble être un dur à cuire. De retour dans sa grotte, elle ne se doute pas qu’à son tour, elle est suivie. Alors qu’elle se questionne sur les raisons de cette présence mettant en péril sa solitude, le trappeur se demande ce qui a bien pu pousser cette femme à chercher un isolement pareil. Il retourne à son campement et se comporte comme s’il se croyait seul alentours. En préparant sa couche pour la nuit, la nostalgie du passé le rattrape. Il se revoit quand il était jeune et plein d’énergie, avec des réflexes foudroyants et des sens aiguisés. À cette époque, alors qu’il chasse le castor sur les bords de la Green River, il est soudainement attaqué par un indien armé d’un tomahawk. Une belle esquive lui sauve la vie, suivie d’un coup de pied qui projette son adversaire au sol. Le combat se poursuit dans la rivière contre cet adversaire plus leste que lui, mais empêtré dans ses vêtements trempés. Après une âpre lutte, il sort finalement vainqueur mais totalement épuisé de cet affrontement, puis laisse le corps sans vie de l’indien être emporté par le courant…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
À travers les trois histoires de la conquête de l’ouest américain contenues dans ce recueil en noir et blanc, P.E. Serpieri (Druuna) renoue avec le western, pour une évocation originale de l’époque, sortie dans les 80’s en Italie, inédite en version française. En remontant le fleuve est la rencontre d’un chasseur alcoolique qui vient payer sa dette à un indien et d’une équipe de géomètres en mission sur le territoire des Pieds Noirs. John and Mary, poignante et poétique réunion de deux êtres malmenés par la vie, mérite le rôle-titre. Empreinte raconte enfin le dernier contrat d’un homme sans foi ni loi qui va être rattrapé par ses vieux démons. Épaulé par Raphaëlle Ambrosio pour les scénarios, Serpieri offre ici un tableau réaliste de victimes collatérales d’une époque qui n’a que trop vu tuer, voler, violer, piller, manipuler les uns (les indiens) et les autres (les cowboys). Son crayonné de haut vol fait le reste, restituant parfaitement l’état d’esprit de personnages d’un réalisme sidérant. Le noir et blanc ne gâche rien, il permet d’apprécier davantage le talent de l’artiste. Son sens du détail, qui apporte tant à l’image, s’accorde à la fine psychologie des intrigues. L’ensemble harmonieux offre à John and Mary sa place dans le cercle très fermé des œuvres complètement abouties. Beau, intelligent, historique et utile au devoir de Mémoire, cet album est une réussite complète. Et Serpieri, en marge d’avoir marqué de son empreinte la BD érotique, enrichit le Far West de la poésie et de l’humanité qui lui manquent si souvent.