L'histoire :
Une silhouette fine, de longs cheveux sous son chapeau vissé sur son crâne. De fines moustaches. L’élégance incarnée, avec son gilet blanc surmonté de sa veste aux longs pans, ses pantalons filiformes et ses bottes de gaucho. Voici Le Collectionneur ! Qui est-il ? Cela restera probablement toujours un mystère, mais on peut affirmer qu’il est un homme du monde. Rares sont ceux qui peuvent se targuer de le fréquenter, mais ils affirmeront tous qu’il est très riche : propriétaire de plantations dans les colonies hollandaises, il aime aussi à fabriquer ses cigares à La Havane pour son seul usage, dispose de plusieurs résidences et autant de domestiques. Sans parler de sa compagnie maritime, de ses champs de thé à Ceylan ou de ses élevages d’Autruches en Afrique du Sud… Il ne se refuse rien et parcourt le monde à la recherche d’objets rarissimes, souvent sacrés. Et il ne s’embarrasse jamais de la Morale pour se les adjuger…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les éditions Mosquito ont eu la bonne idée de regrouper les cinq albums de cette série culte. En effet, Le Calumet de pierre rouge, L’Obelisque abyssin, Le Joyeau Mongol, Le Sceptre de Muiredeagh, et Le Collier de Padmasumbawa étaient initialement parus sans forcement respecter la chronologie et avaient fait l’objet de différentes rééditions. Le monde façonné par Sergio Toppi et le charisme de son personnage, une sorte de Dandy aussi mystérieux que froid, possèdent cette magie qui explique la fidélité de son lectorat. C’est donc un véritable écrin qu’on tient là. Alors, qui est ce Collectionneur ? Un Indiana Jones avant l’heure, à ceci près qu’il n’hésite pas à enfreindre toutes les règles pour satisfaire sa soif d’objets ? Ce qui est sûr, c’est qu’il incarne deux symboles qui renvoient à la littérature du XIXème siècle : l’aventure, mais aussi la convoitise. Peut-on également y voir un lointain cousin aîné de Corto Maltese, même si le personnage est totalement dénué de la poésie qui anime le marin ? Cette question, qui ne trouvera jamais de réponse définitive, n’est pas anodine, car la narration de Toppi s'appuie sur l'exotisme et insuffle un romantisme qu'on retrouve aussi chez Pratt. C'est un euphémisme d'affirmer que Sergio Toppi est un auteur majeur des fumetti italiens. Et même si son œuvre ne sera probablement jamais aussi populaire que celle d'Hugo Pratt, il faut savoir que ces deux génies du 9ème art étaient amis. Toppi était trop humble et respectueux pour en parler, mais il a été celui qui finança la diffusion en Italie des œuvres de son cadet, permettant, entre autres, le lancement de la revue Corto Maltese. Au-delà de sa philanthropie, c’est son talent brut qui nous manquera définitivement. Son art de conter et l’incroyable pureté de ses illustrations… Alors si le hasard explique que vous ne connaissiez pas encore son œuvre ni son Collectionneur, on ne peut que vous exhorter à le faire sans tarder. Et nul ne doute que vous collectionnerez alors ses albums !