L'histoire :
Zanzibar, fin 1914. Le haut commandement de la marine britannique est sur les nerfs. Le Königsber, un croiseur de bataille allemand, vient de couler le Pegasus, navire battant pavillon anglais, à quelques encablures de la base de Sa Royale Majesté. Il est désormais impératif que le navire de guerre teuton soit envoyé par le fond. Les renseignements que possèdent les anglais situent le Königsberg sur le delta du Rufigi, une zone de 400 miles carrés de marais et de forêts. L'affaire s'annonce compliquée, mais un pilote américain va proposer son aide, de façon aussi inattendue qu'efficace...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si Hugo Pratt et Milo Manara font partie du patrimoine culturel mondial, les auteurs supérieurs de nationalité italienne sont aussi très nombreux. On serait bien incapable d'en dresser une liste exhaustive, mais Attilio Micheluzzi y figurerait, sans aucun doute possible. Venu tardivement à la BD, cet architecte de formation revendiquait ouvertement l'influence de Milton Caniff. Une fois n'est pas coutume, les éditions Mosquito font bonne pioche, en ayant la bonne idée de publier ce récit de 1978. Notons qu'il s'agit cette fois-ci de la version Noir et Blanc, car deux autres éditeurs avaient proposé l'album en quadrichromie, sous le titre L'homme du Tanganyika (éditions Aventures et Voyages en 1984 et chez Christian Chalmin 2 ans après). Dès la première page, le décor est planté : nous sommes entre militaires, dans cette Afrique colonisée du XXème siècle, où le raffinement des hommes blancs cache en réalité une offense perpétuelle aux traditions des hommes qu'ils ont asservis. L'atmosphère est étouffante, pour un peu, on entendrait les moustiques et on craindrait de ne plus voir sa dose de quinine. La composition de chaque planche, l'élégance du trait, qui sait aussi épouser la rudesse des caractères des personnages, la qualité de l'écriture, nous rappellent incontestablement la ferveur des récits du vieux Hugo. Quelques fois, le dessin hachuré mais d'une clarté limpide renvoie aussi à Sergio Toppi. Certes, cette histoire de guerre et d'honneur est exigeante, mais elle a pour elle la beauté froide de cette école italienne, qui « fabriquait » des BD comme on n'en fait plus. Un album à (re)découvrir !