L'histoire :
Et si tous les cyclistes du monde décidaient de participer aux Jeux Olympiques dans les rues de la capitale anglaise ? Cela donnerait lieu à un joyeux chaos : des nuées de roues lancées à toute allure sur le bitume détrempé de la capitale, les cyclistes jouant des coudes pour se faire une place au soleil de l'or olympique. Des livreurs de pizzas, des cols blancs de retour du travail, des mères de famille dépassées, des livreurs tout court, des ouvriers partant au boulot, des ectoplasmes, des monstres bizarroïdes, des homes-soucoupes, des tricycles se heurtant, se confrontant, et roulant à fond dans Gattoni Street, près de la Tate Modern ou du London Eye, dans Piccadily ou près de Buckingham, sans oublier, au loin, le fameux concombre qui tutoie la Lune. Après avoir évité underground et gueules de cochon, tout ce petit monde ne devra pas oublier le ravitaillement. Pas de souci, œufs mayo, EPO's bar et burritos seront au menu... Get some free ride les amis, et surtout, pédalez ! Jusqu'au stade olympique évidemment, théâtre de l'enfer et de la gloire à venir...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ugo Gattoni est l'auteur de ce livre-accordéon (leporello) complètement loufoque, long de 2 mètres et riche de multiples péripéties. Le pitch est bref : il s'agit de raconter la course cycliste du siècle dans les rues de Londres, une course des JO revisitée par l'imaginaire débridé d'un auteur qui a un sens du détail peu commun. Se lisant recto-verso, Bicycle déploie des scènes aux frontières du surréalisme et de l'onirisme, le tout assaisonné d'une bonne dose d'humour potache. Les cyclistes ne sont pas réellement humains, naviguant entre monstres industriels et avatars fantomatiques, et le réalisme des décors est proportionnel à l'imaginaire barré d'Ugo Gattoni. Ici une gueule de cochon, là des loopings, plus loin le dôme de Saint Paul... Pour bien apprécier ce livre sans dialogue, mais hyper riche, il faudra au lecteur un peu de concentration, comme s'il jouait à « Où est Charlie ? ». Car les dessins, ultra-précis, forment une iconographie obsessionnelle qui transforme la réalité en un monde inquiétant et étrange, fourmillant de blagues, de détails, de clins d’œil et de drôlerie, qu'on laissera aux curieux le soin de découvrir. Ainsi, cette super réalité inventée révèle-t-elle à la fois un inconscient torturé, une image de l'enfer ou un réalisme accru. Le tout lorgnant gentiment du côté de Salvador Dali. Une chose est sûre, Gattoni a le sens du spectacle virtuose et du détail éloquent. Quand on pense que le format original est plus grand que le livre, on reste pantois devant la performance, qui relève autant de la BD que de l'art visuel. Drôle, riche et renversant : voilà un bien curieux vélo, qu'on enjambe avec allégresse et entrain...