L'histoire :
Toile cirée : Par une nuit urbaine et brumeuse, un mystérieux tueur toque à la porte d’un particulier. Dans le silence nocturne, il poignarde alors de plusieurs coups de couteaux Mr Herrman, chimiste réputé, employé par une grande entreprise qui confectionne des nappes en toiles cirées, à partir de motifs savants. Fier de lui, le tueur s’en va rendre des comptes au grand patron de cette firme… mais ce dernier n’est pas très content. En effet, le fameux chroniqueur Jean-Pierre Bertrand (alias JPB) a été le premier à trouver le corps… or il est du genre opiniâtre dans ses enquêtes…
Centres villes : Un ensemble de sérigraphies (inédites en albums) dévoilent dans des formats de « cartes postales » différentes activités de gens au sein d’une petite ville : clochard, taxi-driver, balayeur, flic, quidam, maire.
La région : Un grand building de Village Natal explose de nuit, ne laissant apparaître qu’une cabane de braconnier à laquelle est pendu l’édile Philémon Notable, avec une carcasse de lapin. On attribue aussitôt l’attentat aux Tontons flingueurs, un groupe d’activistes régionalistes qui prônent le retour de la contrebande. Le ministre des affaires frontalières se rend sur place…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cet épais volume de Contrebande est la réédition en un unique pavé de plusieurs œuvres « de jeunesse » réalisées par un trio d’auteurs : le scénariste Denis Roland, le dessinateur Jérôme Jouvray et la coloriste Anne-Claire Thibaut-Jouvray, dont les premiers traits ont été couchés il y a près de 25 ans ! L’opus réunit en effet Toile cirée (paru chez Delcourt en 1997), Centres ville (un interlude expérimentale jamais paru) et les trois tomes de La région (déjà parus chez Paquet entre 2000 et 2005). Il est très intéressant de revoir les premiers travaux de Jérôme Jouvray, son approche des ambiances et de la bonhomie de ses personnages ici très stylisés, et on mesure ainsi pleinement son parcours d’artiste. En revanche, on comprend aussi pourquoi Denis Roland n’a pas persévéré dans le job de scénariste de BD. Son écriture et ses dialogues sont certes soignés, tantôt littéraires, tantôt pleins de fantaisie, de bons mots, de sympathiques trouvailles et de subtils décalages de paradigmes, il n’en reste pas moins que ses histoires pèchent largement sur le plan de l’immersion séquentielle. En un mot, c’est un peu chiant… Qu’il s’agisse du one-shot Toile cirée et son ambiance de thriller complotiste (pour la première fois publié avec les couleurs d’Anne-Claire Thibaut-Jouvray) ou de l’ambitieuse trilogie La région, à connotation politique régionaliste dans un monde parallèle, on se perd dans les intentions des personnages, on identifie rarement le propos, on ne se passionne guère pour des palabres souvent superfétatoires, qui tournent autour d’un pot sans jamais dévoiler ce qui se trouve dedans. Un riche et sympathique cahier iconographique final prouve que les auteurs se sont néanmoins bien amusés lors de la réalisation de la trilogie.