L'histoire :
Octobre 1949. Alors que son bateau est à quai dans le port de Batavia, Jonathan Melville se décide à prendre la plume. Il se met à raconter à sa fiancée l’étonnante aventure qu’il vient de vivre et qui le décide à rentrer définitivement chez lui. Tout commence trois mois auparavant… Ce matin là, la mer est d’huile et la chaleur étouffante : le thermomètre n’est pas descendu en dessous des 40° depuis plusieurs jours déjà. En fin d’après midi, pourtant, une curieuse houle se forme et bientôt le bulletin météo confirme l’impensable : une dépression hors norme s’approche. A peine Jonathan a t-il le temps d’annoncer la nouvelle au commandant, que le typhon est là, qui les regarde impatient. En quelques minutes à peine, le navire devient un jouet à la merci des éléments qui le déchiquettent consciencieusement. Jeté dans l’océan, Jonathan se sait perdu. Il semble cependant que la mer ne veuille pas encore de lui, puisque quelques heures plus tard, le voici couché sur le rivage d’une île : inconscient mais vivant. Quand il ouvre enfin les yeux, quelques temps plus tard, deux visages d’anges le détaillent : deux jolies jeunes femmes bien décidées à prendre soin de lui… indéfiniment.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour le moins étrange, le récit proposé par Chanouga se met avant tout au service d’un univers graphique enthousiasmant, convoquant avec malice onirisme, fantastique et aventure. Pour son premier album, ce marseillais repéré par Tony Sandoval lors du Festi-Blog, emprunte à son mentor la même force envoûtante du trait : capable d’entrelacer douceur, effroi et toujours teinté de poésie. Ici la profondeur des regards, la légèreté du pinceau, le jeu lavé des couleurs ou le mouvement habile du poignet, rythment parfaitement ce mystérieux voyage aux rencontres improbables et à la curieuse destinée. A ce titre et débarrassé de sa veine horrifique, les amoureux de Sandoval se retrouveront forcément dans ce petit monde mis en mouvements comme un conte. Pourtant économe, le texte distillé le plus souvent en voix off (le principal protagoniste raconte son périple en une lettre destinée à son amoureuse…) est habilement servi : les mots sont pesés, justes, et ils savent admirablement faire la place aux « silences » des dessins. Pour autant, on regrettera que le scénario manque un peu d’épaisseur. Car s’il porte un univers intéressant qui s’inscrit parfaitement dans la lignée des récits de voyages propices à dérider notre imaginaire, il nous laisse orphelin de trop nombreux développements. Au final, on aura ainsi du mal à comprendre clairement ce qui est arrivé, qui à fait quoi et pourquoi. Bien sûr, on pourra bâtir ses propres réponses sans trop de difficultés, mais on aurait préféré que le récit s’en charge pour nous. Une belle balade, en tous cas, à ne pas refuser. En attendant de retrouver ce fabuleux et sensible coup de crayon sur un prochain ouvrage...