L'histoire :
1969, à Budapest. Dezso Szentgyörgyi Jr révise pour se préparer à ses examens universitaires, lorsque la sonnette retentit. Le jeune homme ouvre la porte, mais il n'y a personne. Il pense à un canular, mais s'aperçoit qu'un paquet a été déposé sur le seuil de la maison, dans laquelle il vit avec sa mère. Quand il déchire le papier grossier qui sert d'emballage, il découvre un livre sur les as du combat aérien. Dans la liste, le nom de son père. Alors il décide de lui rendre visite, pour savoir ce qu'il en est. Son père confirme et lui explique pourquoi il avait jusque-là gardé le secret. Crédité de 34 victoires contre l'adversaire, il eut le plus grand palmarès parmi les pilotes de chasse durant la Seconde Guerre Mondiale. Mais les Hongrois étaient à l'époque les alliés de l'Allemagne hitlérienne... et depuis, le pays est tombé sous la coupe des Soviétiques. Ce qui lui a valu d'être poursuivi, torturé et une fois libéré, traité comme un paria. A cette époque, son fils avait trois ans...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec ce troisième album chez Paquet, Gyula Posgay est en train de se faire un nom dans la BD spécialisée « aéro ». L'auteur hongrois s'était déjà fait remarquer il y a deux ans avec The Old Tiger, l'histoire de son grand-père, artilleur dans un bombardier durant la Seconde Guerre Mondiale ; puis l'an dernier avec The Young Lion, dédié à la mémoire de Laszlo Molnar, considéré comme le meilleur pilote de la chasse hongroise durant la Seconde Guerre Mondiale. Cette fois-ci, avec Invisible Ennemy, il rend un nouvel hommage à un autre as, mais ajoute le contexte politique d'après-guerre. En effet, l'armée hongroise fut l'alliée du Reich et une fois la guerre perdue, elle tomba dans le bloc Est. Et c'est peu de dire que les apparatchiks de cette époque traitèrent les vétérans comme des parias. On assiste donc à une pure injustice, celle d'un soldat qui mit des dizaines de fois sa vie en péril pour servir une nation qui allait le punir en retour. L'homme était noble, à tel point que, lorsque l'avion d'un de ses camarades était abattu et que le pilote pouvait s'extraire et ouvrir son parachute, il quittait le dogfight pour tournoyer autour du parachutiste posé au sol, afin de le protéger des troupes adverses. Une autre fois, il interrompit le combat contre un P-51 Mustang arrivé à court de munition et le laissa repartir. Interrogé alors par sa hiérarchie pour avoir épargné un ennemi, il répondit qu'il était un soldat et non un assassin. Finalement réhabilité après de longues années de calvaire, l'ironie du sort fit qu'il se crasha lors de son dernier vol en civil, avant de pouvoir prendre une retraite prévue le soir du drame... C'est cette histoire exceptionnelle que nous délivre l'auteur, avec une BD aussi spectaculaire qu'émouvante.