L'histoire :
Immense entreprise, « La Fabrique » écrase la ville du poids de ses cheminées gigantesques, qui crachent à longueur de journée le poison de sa surproduction : peu importe la pollution extérieure, pourvu que le bureau du chef d’entreprise soit débarrassé du moindre recoin poussiéreux. Le Patron est ainsi et il dirige avec un inégalable talent ce petit paradis capitaliste dans lequel on surveille de près la courbe des bénéfices. Quand ces derniers faiblissent, on cherche la solution pour économiser un petit million d’euros par mois : suppression du poste de PDG (ce qui suffirait largement) ? Sympa, ce genre d’humour, pense le Patron lorsque son comptable évoque la solution. Non, le plus sérieux serait de procéder à un providentiel dégraissage massif. Dans une telle hypothèse, que les plus trouillards soient rassurés : l’idée de plonger une partie de l’effectif dans une cuve d’acier en fusion, pour éviter le paiement des indemnités de licenciement, ne traversera jamais son brillant esprit. Il serait en effet trop couteux de maintenir de l’acier à de telles températures pendant un laps de temps trop important…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Grinçant comme une porte dont les gonds sont définitivement fâchés avec la burette d’huile, piquant comme le hérisson qui s’ébroue après sa douche matinale ou acide comme un citron, l’album des lorrains Peb et Fox débarque à point nommé dans une période où les excès du capitalisme sont pointés du doigt. Soyez tout de même tranquillisés, vous ne tiendrez pas entre vos douces mimines un de ces brulots incandescents qui tente de vous endoctriner ou de vous faire la leçon, mais simplement un ouvrage à l’humour corrosif dont l’objectif est de vous distraire avant tout. Sur le rythme d’un gag par planche, nous voici accompagnant « Le Patron », totalement déshumanisé, (normal : c’est une souris !) qui fait avaler, à longueur de planches, des couleuvres ou des pilules grosses comme des roues de camions à ses employés, partenaires économiques, chefs d’états ou autres paillassons, sur lesquels ils s’essuient les pieds allègrement. Vous l’aurez compris, il s’agit de grossir le trait, de montrer du doigt jusqu’à l’absurde, pour interpeller un chouya en surfant avec talent sur la vague du rire second degré. Les 2 compères réussissent plutôt bien ce difficile exercice et l’on se surprend à sourire de ces situations pas si éloignées que ça de la réalité. Le dessin simplissime aux couleurs unies donne au graphisme un aspect enfantin qui assoit le parti-pris de ne pas vouloir se prendre au sérieux. Une intention salvatrice qui soulage nos petits cerveaux gavés par cette fameuse crise conjuguée à tous les temps.