L'histoire :
Martha Likk est une jeune écrivaine à succès. Mais si elle a du talent, elle doit surtout sa réussite artistique à un pacte passé avec les forces obscures. Pour leur échapper et retrouver la paix, elle décide d’aller trouver une sorcière. Cette dernière lui confie une petite branche ensorcelée lui permettant de rester dissimuler à tout jamais des yeux du démon. Martha se met alors au vert dans une petite ville de campagne, espérant ainsi se faire oublier définitivement. Néanmoins, le sortilège, s’il permet d’éloigner son créancier, l’expose désormais aux attaques de créatures tout aussi dangereuses et peu recommandables. Et justement… Alors que notre écrivaine se repose dans sa villa, une petite bestiole volante, répondant au nom de Xinophixerox, décide de semer quelques graines de sa méchanceté à quelques lieux de là. Il suffit juste d’attendre que ça pousse, que ça se transforme en concombre avec un œil au sommet, puis de le faire ingurgiter par malice à quelques pauvres victimes. Après tout, l’expérience n’a pas d’autre objet que de permettre à la petite créature brune de nourrir des desseins démoniaques peu ragoutants…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce coquin de Tony Sandoval joue avec malice de l’euphémisme, pour nous proposer une nouvelle plongée dans son univers déjà délicieusement représenté par des séries comme Le cadavre et le sofa ou Nocturno. Car sa petite bestiole ébène au patronyme imprononçable, vague croisement entre un cachalot et une chauve-souris, ne se contente pas de renverser un pot de confiture ou de se mettre les nageoires dans les trous de nez. Non, ici ça dépèce, ça déchiquette, ça tranchouille, ça hémoglobine à bouillon, ça investit la chair ou ça « sexe » avec bestialité… Bref en guise de bêtises, l’auteur mexicain nous sert un récit dont il a le secret. Une histoire dans laquelle la veine horrifique ou onirico-hallucinatoire, servie par une narration proche du conte, est très largement exploitée. Il franchit d’ailleurs peut-être un pallier, en chatouillant un peu plus nos angoisses cauchemardesques, ne craignant pas de tâter du gore pour faire s’ébattre monstres et démons, zombies de tous poils et autres possédés. Le pire, c’est qu’avec un dessin qui relève de l’envoûtement, la pilule s’avale sans difficulté. Le fin crayonné mis en couleurs par de douces aquarelles, l’aération des cases, éloignent à merveille la violence, voire la bestialité de certaines phases du récit. Il y a des velléités anxiogènes, mais le médicament du coup de crayon fait largement son effet. Pour ce qui est du scénario, on regrettera qu’il serve d’abord cette mise en mouvement de l’univers proposé. En effet, l’idée d’un écrivain ayant pactisé avec des démons est bonne. De même, l’intervention d’une dimension démoniaque plait : la bestiole à son petit quelque chose de rigolo et les personnages sont attirants. Mais il manque une vraie intrigue et une conclusion éclairant un chouya nos lanternes, au moins. A réserver donc, avant tout, à un public averti et plutôt amateurs de jolies « sandovaleries ».
