L'histoire :
En novembre 1898, un marin retrouve un cadavre dans les eaux glauques du port de sa bourgade. C’est le docteur Weiss, un vieil homme sombre et étrange, qui habitait jusqu’alors un manoir isolé sur un minuscule îlot au large. Dans les jours qui suivent, le notaire local Lebec fait des recherches et convoque par voie postale le seul héritier connu, Georg Weiss, son petit-neveu. Voyageur et écrivain, le jeune homme fait donc le trajet en train. A l’arrivée, il accueilli par Maître Lebec, qui l’instruit des détails sur cette succession nimbée de tensions. Car faute d’héritier, la concession de l’île devrait en théorie revenir sous peu à la municipalité… Le bedonnant et despotique commissaire Alazard, à la solde du maire, exerce d’ailleurs des pressions sur maître Lebec à ce sujet. Le notaire, quant à lui, pense que le docteur Weiss n’est peut-être pas si mort que ça. Car si l’on en croit la date qui se trouve sur l’acte de propriété de l’île, le docteur devrait avoir plus de 120 ans ! En outre, voilà qu’un témoin assiste à un assassinat en ville et impute le crime au docteur Weiss. Le cadavre est retrouvé exsangue, avec deux petits trous à la base du cou ! Weiss serait-il devenu vampire ? Le temps de démêler la succession et de comprendre, Georg s’installe à l’auberge du coin, sous les regards noirs des habitants…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour ce one-shot policier et fantastique, le scénariste Clod fournit au dessinateur Benoît Frebourg une partition narrative propice à dérouler d’épaisses ambiances frissonnantes. Cette histoire vaut en effet surtout pour ses atmosphères lugubres, nimbées de brumes, de froidures hivernales, ses clair-obscur révélés par la modernité d’un dessin d’une belle tenue. Frebourg alterne en effet les styles et les techniques graphiques, au gré des besoins des séquences, sans jamais y perdre en cohérence d’ensemble et en tensions. Un puissant timbre fantastique accompagne cette « enquête » tout du long, en toutes circonstances. Les personnages ne sont pas en reste, avec des chara-design très marqués et tourmentés dans leurs profils psychologiques. Cependant, le récit pêche peut-être justement par l’épaisseur de ses mystères, qui convoquent et amalgament décidément beaucoup d’archétypes du registre fantastique et policier. Il est question de vampires, d’un sérum, d’un tueur, d’un laboratoire secret, d’un manoir isolé, d’un potentat local, de souvenirs enfouis… Tout cela compose certes un bouquet de fausses pistes assez réjouissant, mais au terme d’un final en queue de poisson, on ne sait plus trop laquelle a été prédominante. On ressort de cette lecture avec le sentiment irréel et intemporel d’avoir traversé un morceau d’enfer bien poisseux…