L'histoire :
Deux hommes marchent chargés comme des mules à travers les étendues rocailleuses et glacées du grand Nord Arctique, dans la lumière rasante. En traversant un cours d’eau, l’un d’eux se tord la cheville contre un rocher. Malgré son cri et ses appels, son compagnon Bill continue de marcher sans se retourner. L’homme comprend que la loi de survie qui prévaut est désormais « chacun pour soi ». L’homme parvient à s’extraire de l’eau et à remonter la berge. Au sommet de la butte attenante, d’où il ne voit qu’un paysage désolé et désertique, il constate qu’il est effectivement désormais seul. Il convoque sons sens de l’orientation et poursuit en marchant dans une direction. Le soir venu, il fait enfin halte. Sa cheville est très endolorie par l’entorse. A la lueur de son feu de camp, il constate que ses mocassins sont usés. Il s’en fabrique de nouveaux à l’aide de bandes de tissus, qui lui maintiendront la cheville pour les kilomètres qui lui restent à parcourir. Il protège et range consciencieusement les 67 allumettes qu’il lui reste, pour les jours suivants. Il parvient à dormir emmitouflé dans son sac de couchage. Le lendemain, la problématique de l’alimentation se rappelle à lui. Il n’a plus une seule cartouche dans son fusil et son estomac commence à souffrir des baies et des racines âcres qu’il ingurgite depuis des jours…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans cette BD inspirée de l’œuvre de Jack London, sans préalable, vous découvrirez les circonstances au fil des pages. Cet homme perdu est un prospecteur d’or de retour d’une campagne fructueuse. Mais sa localisation au Nord du cercle polaire arctique fait du propos central une question de survie en milieu hostile et dans la solitude absolue. Il devra combattre quatre ennemis redoutables : la faim, le froid, une entorse à la cheville et la présence de loups affamés, qui rôdent autour de lui. Cet album n’évoque aucun titre de nouvelle ou roman en particulier. C’est néanmoins la troisième BD que propose Pierre-Emmanuel Dequest sur l’œuvre générale de London (après L’appel de la forêt et Croc blanc) et c’est toujours aussi pertinent. Ses choix de découpage, ainsi que le réalisme de son dessin surtout focalisé sur les paysages du Grand Nord, magnifient toujours fort bien la substance du propos de l’écrivain américain qui a été réellement prospecteur d’or dans le Klondike à la fin du XIXe siècle. L’angoisse monte progressivement, à la même vitesse que la silhouette de ce héros sans nom s’amincit. Les décors désolés et glacés s’accompagnent tantôt de rencontres animales réelles ou divaguées également très réalistes. Le survivalisme de fond se teinte alors d’une dimension naturaliste.