L'histoire :
L’accouchement a été difficile. Si difficile que les médecins ont diagnostiqué de futurs problèmes physiques pour le bébé. Problèmes respiratoires à l’accouchement… des séquelles physiques possibles un jour. Mais rien de plus. Depuis, c’est l’angoisse, l’attente et la peur. Les parents sont sous prozac et Angelo grandit plutôt bien. Avec quelques troubles cependant, comme une apathie régulière et inquiétante. Le père estime que c’est de la fainéantise, mais c’est sûrement dû aux difficultés de la naissance. Tout se déclenche au lycée. Alors que les élèves récitent une poésie, Angelo étrangle une fille de la classe au moment où l’on parle de serpent qui enserre un autre serpent. Angelo explique que c’est Odile qui lui a dicté la marche à suivre et qu’il se devait d’obéir. On amène donc le lycéen au centre Il Game. Ici, une enseignante nommée Gloria fait travailler les enfants. L’intégration d’Angelo se passe plutôt bien, jusqu’au jour où il pointe un crayon de papier sur les yeux de Gloria et qu’il se coupe ensuite la langue avec des ciseaux ! La mère et Gloria attendent, angoissées, des nouvelles d’Angelo…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La couverture et le titre sont trompeurs. Comme la postface l’explique, ce personnage de Gloria, blonde, maquillée, belle et dans les réseaux sociaux, est bien loin d’être une fille superficielle. Au contraire, elle travaille dans un domaine on ne peut plus sensible : l’inceste. Nous nous excusons par avance pour ce spoil, mais il fallait en parler pour bien comprendre la lourde tâche et l’immense travail effectué par Almudena Pano. L’artiste a décidé de construire une tranche de vie en multipliant les points de vue : par le prisme des enfants, des familles et de Gloria, le sens se construit petit à petit pour mieux se détruire avec la terrible révélation que cache chaque saynète. On admire la finesse de la narration qui aborde ce thème pesant de façon sensible et humaine. Sans pour autant prendre de gants, Almudena traite de façon large et objective un sujet douloureux et tabou dans nos sociétés. Que ce soit les étapes de l’acte monstrueux, les dégâts causés dans les familles, les ravages sur l’enfant ou les actions difficiles menées par le centre d’aide, tout est raconté de façon intelligente et progressive, sans jugement de valeur ni accusation violente. Car c’est l’humain que l’on vise, tout simplement. La justesse de ton est d’autant plus remarquable que l’on apprend à la fin du volume que Pano a elle-même vécu de près l’inceste au sein de sa famille. Le graphisme si particulier de l’artiste participe aussi à cette belle peinture de l’humanité. A mi-chemin entre les couleurs criardes d’un Andy Warhol et les traits ronds et sensibles d’une Chloé Wary, le dessin marque les esprits. Ce mélange de silence et de couleurs saturées représente à merveille toute la complexité de l’inceste qui ne se dit pas et qui finit par exploser dans l’existence des enfants. Cette BD fera référence sur un thème souvent étouffé par le déni ou la honte.
