L'histoire :
De nos jours, en répétition d'une pièce de théâtre, Aziz incarne un enfant d’un pays en guerre qui a perdu toute sa famille. Mais le sujet est trop fort pour lui. Il quitte la salle de théâtre bouleversé et redevient celui qu'il est vraiment, Amed. Jadis, Amed et son frère jumeau Aziz jouent tranquillement dans les montagnes avec leur cerf-volant, lorsqu'un missile atterrit chez leurs grands-parents. Avec leurs parents, ils découvrent dans les débris les corps inanimés de leurs aïeux. Ils les enterrent le lendemain dans l’orangeraie familiale. Ils reçoivent alors la visite d’un groupe d’hommes. Soulayed, le chef, recrute des jeunes hommes pour les sacrifier, tels qu’Halim présent parmi eux. Ce dernier se fera exploser le lendemain dans un bus bondé « d’ennemis ». Soulayed leur explique le plan : le sacrifice qu’ils doivent accomplir à leur tour au nom de Dieu. Car Aziz a un problème de santé, il a peu d’espérance de vie. Malgré le verdict, leur père choisit Amed, leur fils en bonne santé, pour ne pas offenser Dieu. Néanmoins, la mère refuse de perdre ses deux fils et supplie son fils Amed de convaincre son frère Aziz de porter la ceinture d’explosifs à sa place. Un matin, Soulayed vient chercher un petit garçon de neuf ans, lui installe un détenteur sur la ceinture d’explosifs, qu’il aura préalablement mise autour de son ventre. Il emmène ce gamin par la main en haut de la montagne pour lui montrer le chemin qui le conduira vers Dieu. Ce petit garçon se rend à pied dans un camp de réfugiés, qu’il pense être rempli de soldats ennemis, pour se faire exploser et tuer les innocents qui l’entourent. Son frère devra vivre avec cette douleur dans ses entrailles, la culpabilité d’avoir laissé partir son frère à sa place et de l’avoir perdu à tout jamais. Il va s’en rendre malade. Plus tard, il trouvera le théâtre comme moyen de crier sa rage. Y parviendra-t-il ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’orangeraie est adapté du roman éponyme paru en 2013 aux éditions Alto. Ce court récit a été écrit par le dramaturge québécois Larry Tremblay, qui a acquis sa petite renommée en remportant de nombreux prix littéraires – notamment avec le succès de l’Orangeraie, qui a été traduit en 23 langues. L'auteur belge Pierre Lecrenier a précédemment déjà collaboré avec Larry Tremblay, lors de l'adaptation de sa pièce de théâtre Le Garçon au visage disparu (2021). Ils signent ici ensemble une magnifique adaptation littéraire. Le graphisme est assez brut, moins détaillé que dans leur dernière collaboration. Néanmoins, le découpage est subtil. Il y a peu de dialogues, pourtant tout est dit, tout transperce : l’amour, la peur, la honte et la guerre. L’orangerais immuable, d’une beauté sans nom, d’une odeur douce, entoure ces personnages qui vivent le pire, l’inhumain, l’indicible. Le propos souligne l’absurdité de ces hommes, entourés pourtant de beauté et de richesse, qui vont chercher l’inacceptable au nom d’un être invisible. Tous ces enfants innocents qui ne demandent qu’à jouer et qui se retrouvent enrôlés pour une mission morbide. Cette bande dessinée résonne malheureusement avec l’actualité.