L'histoire :
En 1875, Charity Tiddler a 5 ans. Elle vit avec ses parents en leur maison cossue de la campagne anglaise. Sa mère lui fait réciter par cœur les préceptes de la Bible qu’elle trouve primordiaux. Mais clairement, la messe n’est pas la grande passion de la fillette, qui souffre terriblement d’être la seule enfant de la maison. Alors Charity se trouve un premier petit compagnon de jeu, une souris, au sujet de laquelle sa bonne Tabitha parvient à conserver le secret absolu. Charity s’amuse à transférer sa souris – baptisée Miss Petitpas – d’une boîte à chapeau vers une cage. Elle la fait jouer dans ses maisons de poupée, elle la laisse manger la cire des bougies… Et évidemment la souris meurt subitement, sans doute d’une indigestion. Alors Charity se rabat sur Miss Tutu, une autre souris. Mais aussi sur Dick le hérisson (qu’elle nourrit avec des escargots), une grive à l’aile cassée (qui bouffe des vers coupés en rondelles), un oisillon tombé du nid (qu’elle étouffe malencontreusement avec du porridge), Darling le crapaud (qui refuse de se transformer en prince charmant quand elle l’embrasse)… Charity apprend ainsi la nature, dans les drames successifs, croyant toujours bien faire, persuadée de faire progresser la science…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A l’origine, Miss Charity est un personnage de roman jeunesse, animé par Marie-Aude Murail. La fillette est l’enfant unique d’une noble famille britannique établie dans une demeure cossue de la campagne anglaise victorienne (1875). Or vue l’époque et le lignage, elle se doit évidemment de respecter un carcan éducatif particulièrement étriqué et drastique. C’est le contraste entre cette éducation rigoriste et son caractère curieux et frondeur qui fait tout le sel de ses aventures domestiques. Car ses aventures en question ne l’emmènent jamais aussi loin que celles de son contemporain Robert-Louis Stevenson ! Tout au pire voyage-t-elle jusque chez ses cousins, dans un manoir proche… Pour tromper sa solitude et ses insupportables obligations, Miss Charity trouve plutôt l’aventure dans une approche darwinienne de la vie alentours, et en cela elle se rapproche des expérimentations d’un autre de ses contemporains. Charity élève en effet – plus ou moins bien – tout un tas de petits animaux des champs – hérisson, souris, poussins… Et elle se découvre une réelle passion pour les dessiner. A l’origine de ce personnage attachant, Marie-Aude Murail a en effet imaginé ce qu’aurait pu être l’enfance de Beatrix Potter, la célèbre autrice et illustratrice de Pierre Lapin. L’adaptation de l’adaptation est ici réalisée par un duo rompu aux œuvres jeunesse : Loïc Clément au scénario et Anne Montel au dessin (Le temps des mitaines, Chaussette, Les jours sucrés…). A partir de cette matière première de première bourre, le duo n’a pas à forcer beaucoup son talent. Réparti en « sketchs », le quotidien de Charity prend place, via un dessin stylisé et complété de pastels, dans un découpage sans bordures de case. Le verbe soigné, littéraire, ainsi que la truculence des inventions de la gamine, se révèlent la principale plus-value de ce premier tome de 120 planches.