L'histoire :
Giulia et Mae reviennent dans leur campagne normande après un séjour linguistique à Londres pendant les grandes vacances. Elles ont 16 ans et sont ravies de retrouver leur super copine Alice, restée en France. Ensemble, elles composent des chansons sur une guitare, avec des textes inspirés de leur idole, le beau et ténébreux Isaac Dean. Alice est un peu plus dévergondée que les deux autres : elle a déjà couché avec des garçons et fait régulièrement des « trucs » avec Anton, un jeune voisin. Lors d'une baignade au bord d'un lac, Anton leur apprend une nouvelle à peine croyable : Isaac Dean est revenu pour l'été dans sa maison familiale, précisément dans leur coin de bocage normand. Aussitôt, Giulia, Maé et Alice deviennent hystériques. Elles se donnent le challenge d'aller lui rendre visite dès le lendemain. La maison de campagne, sans autre charme qu'un pavillon lambda, a l'air abandonnée, le jardin en pagaille. Pourtant, la porte est entrouverte. Les trois filles sont intriguées... Elles s'apprêtent à tenter une entrée, lorsque Isaac Dean en personne apparaît subitement derrière elles. Il est bourré, débraillé et insultant. Il méprise violemment ces pisseuses qui viennent déranger sa quête d'inspiration et leur intime l'ordre de dégager. Les copines sont interloquées. Alice ose cependant contredire la star et pénétrer dans la maison en le suivant à l'intérieur...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après La falaise, Manon Debaye poursuit dans la même veine de chronique adolescente, mettant en scène des jeunes filles tiraillées entre leurs amitiés, leurs ambitions personnelles, leurs hormones et leurs constructions sociales. La technique graphique s'affine, toujours selon une griffe réaliste couchée sur papier à l'aide de crayons de couleurs, qui installe à la fois douceur et proximité. La forte pagination lui donne le temps de bien exposer des psychologies de personnages attachantes et cohérentes. Ce one shot se déroule en deux parties, à deux époques séparées de 7 années. Premièrement, on suit la concrétisation du rêve absolu de toutes les groupies : trois copines ont le bonheur suprême d'approcher leur star, un chanteur ténébreux – et un pur connard. L'une d'elle va trop loin et se brûle les ailes... L'acte déclencheur d'une tragédie. Les choses reprennent et aboutissent 7 ans plus tard dans la seconde partie, alors que les ados sont adultes – et le chanteur toujours connard. A travers cette histoire, l'autrice creuse cet âge tendre et complexe, de « transition » entre les espoirs de devenir et la réalité mâture, entre les pathétiques rêves de groupies et la triste prise de conscience. Une période de la vie que Manon Debaye connaît bien pour l'avoir inévitablement vécu ; et qu'elle décortique et retranscrit admirablement en art séquentiel page-turner.