L'histoire :
En avril 1770, à Palerme, les médecins appellés au chevet de la jeune et belle Rosalia di Sangro ne peuvent rien faire pour éradiquer le mal qui la ronge. Son père, le Prince de Sansevero, est effrondé : après sa tendre épouse, c’est sa fille unique qui le laisse face à ses démons. Et ceux-là, il sait bien qu’il est allé les titiller il y a prés de 20 ans… A l’époque, il voyage dans la splendide Venise avec son cousin Frederico. Di Sangro est alors passionné par les sciences et le progrès, que sa condition d'aristocrate lui a empêché d’étudier à l’université. Il est aussi franc-maçon et participe justement à une rencontre dans une loge qui l’initie pour la première fois à la dissection d’un corps humain. Le Prince de Sansevero est fasciné par le geste vif et sûr de l’étrange homme qui pratique l’intervention, le docteur Salerno. Les deux hommes ne tardent d’ailleurs pas à sympathiser, en particulier lorsque Salerno parle d’un projet qui lui tient à cœur et qu’il est sur le point de réaliser : figer l’appareil circulatoire d’un cadavre. Il lui faut juste pouvoir œuvrer en secret pour ne pas s’attirer les foudres du clergé. Or pour cela, il a besoin de beaucoup d’argent. Justement, di Sangro, de l’argent, il en possède énormément...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Agréablement révélé avec Des chiens et des loups, le tandem Colin-Thibert / Soularue se reforme avec autant d’appétit, pour se mettre au diapason d’un récit mêlant faits historiques, fantastique et fiction. Chassés les noirs profonds, les déliés de gris et le blanc immaculé pour figer drame et tragédie… Stéphane Soularue fixe ici des rouges sangs, des jaunes tranchants, pour circonscrire une gêne anxiogène permanente. Et ça marche. D’autant que la thématique mise en place par le récit s’y prête assez facilement. Nous sommes au XVIIIéme siècle, entre Naples et Palerme, et nous suivons un personnage singulier : Raimondo di Sangro, Prince de Sansevero. Franc-maçon, scientifique passionné par l’anatomie, notre aristocrate deviendra le mécène d’un curieux personnage, l’énigmatique docteur Salerno. En jeu, des expériences inédites et interdites pour tenter de toucher du doigt le secret de la Création… à ses risques et péril. Bien que relevant exclusivement de la fiction, le récit concocté par Colin-Thibert s’inspire très largement du mystérieux Prince de Sansevero (1710-1771). Mais surtout de sa sulfureuse légende et de ses fameuses machines anatomiques, à savoir : deux cadavres humains suspendus verticalement, dont seuls les os, le système cardio-vasculaire presque complet et quelques organes, ont été conservés. Autour de l’énigme de ces deux pièces morbides – retrouvées dans une chapelle de Sansevero – le récit brode un conte cruel en forme de thriller, faisant l’œillade à la légende du Golem mâtinée de Frankenstein. Le rythme est habilement distillé par une mise en scène juste et plutôt happante ; l’ensemble des protagonistes relativement bien ciselé. On regrettera juste l’absence de réelle surprise pour donner un véritable petit plus au récit.