L'histoire :
C’est à Svanegard, au Danemark, à la fin du XIXéme siècle, qu’Aksel Storm pointe le bout du nez. Ses parents n’avaient à priori aucune raison de filer le parfait amour, mais un seul regard aura pourtant suffi. Bien vite, Olaf Storm sent que sa femme Klara lui échappe et qu’il aura bien des difficultés à assouvir ses besoins. Aussi, tandis qu’il se réfugie dans l’agriculture et les questions locales, elle s’enferme dans sa solitude. Elle reste à peine éveillée par la soif de poésie qu’elle a pour son fils Aksel. Elle déteste la boue et les paysans : Aksel lui promet de devenir un grand poète et de réaliser ses rêves... En attendant, le gamin qu’il est passe la plupart de son temps avec son ami Sophus, le fils du pasteur. Pour eux, la moindre occasion est prétexte à faire virevolter leur imagination. Ils font la guerre aux Turcs, broient des os aux Sarrasins, conversent avec des hommes à têtes d’animaux, tutoient le Troll et festoient avec Elfes ou âmes flottantes. Sophus est docile, dévoué. Aksel est le maître du jeu. Bientôt, pourtant, les choses vont changer, lorsque la famille accueille pour quelques temps le jeune Frederik. Rapidement, Aksel est fasciné. Frederik dessine à merveille et il aimerait étudier la peinture à Copenhague. Mais surtout, il semble terriblement déterminé. Une détermination rapidement communicative qui balaie les jeux de l’enfance…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Très librement inspiré du roman naturaliste Niels Lyhne (1880) de Jens Peter Jacobsen, ce nouveau récit mis en boîte par le tandem Pandolfo-Risbjberg convoque plus de 40 ans de la vie d’Aksel Storm, de manière aussi sensible que les très accrocheurs Mine, une vie de chat et L’astragale. De la campagne danoise, fin du XIXème, à Copenhague, la capitale, en passant par les rives boisées du lac de Tissø, on accompagnera les méandres de cette destinée romanesque confiée à un entrelacs sensible et attachant. Très vite, le personnage central attrape, ses amis fascinent, le bouillon intellectuel ou artistique qui accompagne son désir de devenir un grand poète scelle notre envie. Et puis il y a ces amours inaccessibles, cette mère à combler, l’abandon de toute croyance en Dieu, cette folie latente ou cette incapacité à vivre le monde tel qu’il est, et ce cruel sentiment de ne pas devenir, qui offrent leur tison dramatique juste ce qu’il faut. Bref, une parfaite alchimie du désarroi, effeuillée en plus de 200 pages et parfaitement ajustée au rythme d’une vie qu’un pas grand-chose semble pouvoir faire basculer… et qui peine douloureusement à s’accomplir. Etayé par un peu plus d’événements, de quelques rebondissements et d’action, l'ensemble aurait d’ailleurs pu prendre les atours d’une véritable saga. Mais le choix de mettre en scène ce glissement fataliste en une musique romanesque impeccablement dosée se révèle tout aussi judicieux. Il offre en particulier une incroyable déclinaison de la fragilité humaine. Au dessin, Terkel Risbjerg confirme une aptitude au sensible sans commune mesure, qui enveloppe le récit de bout en bout. On aime son habilité à capter les regards de ses personnages, ses contrastes en clair-obscur et cette capacité à faire passer les émotions en à peine deux ou trois traits effilés.