L'histoire :
En 1930, dans les Smoky Mountains, un train entre en gare à Waynesville. Deux hommes attendent le retour de leur patron parti trois mois à Boston pour affaire et qui revient marié. Sacré Pemberton ! Dès la descente de la voiture de première classe, l’atmosphère change, quand elle apparait. Serena coupe le souffle de Wilkie et Buchanan. Elle devine d’entrée qui est qui, puis reprend l’un et l’autre sur leurs manières de serrer la main sans regarder droit dans les yeux. Buchanan prévient Pemberton qu’il est attendu par le vieux Hamon, sa fille et un nouveau-né. Le patriarche a un compte à régler avec le jeune marié. Serena s’interpose puis ordonne à Pemberton de régler cette affaire vite fait. Le vieux sort un couteau et fend l’air en s’approchant de sa cible. Malgré les cris de sa fille, il plante la lame dans le bras de l’homme d’affaire. Celui-ci la retire prestement et sort son propre couteau pour achever un vieux en bout de course et sans défense. Le shérif Mac Dowell arrive juste à temps pour demander des comptes à Pemberton, qui s’en tire avec une amende de 10$ pour désordre sur la voie publique…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Adaptation du roman éponyme de Ron Rash par Ane-Caroline Pandolfo et Terkel Risbjerg, Serena ne perd pas de temps pour planter un décor rude et viril, à l’image de l’héroïne. En 1930, aux Etats Unis, la crise de 29 résonne encore et la précarité de millions d’américains est une triste réalité. Parmi eux, les dominants vampirisent les ressources et les hommes, c’est un cauchemar éveillé. Le non-droit acquis aux riches leur permet d’agir en toute impunité, mais en pire qu’aujourd’hui. Cet album est le fruit d’un duo déjà bien rôdé à l’adaptation, mais qui continue de s’affuter. Le trait simple de Risbjerg contient beaucoup plus que le premier abord peut le suggérer. La mise en scène est exemplaire, les plans travaillés aux petits oignons. Les gueules des personnages, bien distinctes, permettent de suivre cette riche histoire facilement. Les couleurs apportent une chaleur qui compense la froideur des protagonistes, c’est très bien vu. Enfin, l’ambiance tendue au cordeau connait des pics avec des silences et des regards hostiles à faire froid dans le dos. L’adaptation de Pandolfo est à la hauteur de la qualité du roman. C’est une prouesse, un peu comme lorsque le film issu du livre ne déçoit pas. De la première scène à la dernière, la tension est présente. Serena en Folcoche patronale est simplement divine, mais elle n’est pas le seul personnage doté de profondeur, c’est ça qui rend l’histoire passionnante. Toute la palette des émotions est balayée à travers une galerie très réelle de personnalités fortes et moins fortes, qui nouent leurs destins sur les pentes des Smoky Mountains. La couverture surfacée présente Serena toute vernie, un fusil dans les mains, entourée de ses hommes de l’ombre émergeant du noir mat : superbe.