L'histoire :
Daphné entend pour la première fois Anne Nivat sur les ondes de France Culture, pendant qu’elle finit son dernier livre, baignée par la lumière d’un petit village marocain. Cette rencontre radiophonique intervient au bon moment : celui où les mots de cette grande reporter trouve un écho dans sa propre existence en un contraste évident : une facilité à se fondre, pour la journaliste, dans les mondes qui ne sont pas les siens, qui dénote avec la difficulté pour l’artiste de trouver sa place dans ce Maroc si différent. Lorsqu’elle retourne à Paris pour des raisons professionnelles, rencontrer Anne Nivat devient une évidence : rendez vous est fixé dans un café de la capitale. La femme pétillante qui débarque ce matin-là est tout le contraire de l’image que s’en était faite Daphné, tellement éloignée de ses reportages empreints de gravité : expansive, drôle et changeante, simplement pleine de vie… Anne lui raconte alors la République Tchèque, la Tchétchénie, l’Irak, l’Afghanistan… Elle parle de ses parents et du don qu’ils lui ont fait, en partageant avec elle leur amour pour les autres, goutant les cultures étrangères en véritables citoyens du Monde… Une manière d’aborder la vie qui fascine Daphné Collignon, plus habituée à l’univers intime de ses créations, une mise en danger perpétuelle et indispensable à 1000 lieues de son quotidien.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Incontestablement, l’ouvrage sus décri compte pour Daphné Collignon : la sensibilité touchante du trait, le choix des couleurs, l’omniprésence des regards profonds, le patchwork judicieux des croquis et des photos montages, témoignent de ce qu’elle y a laissé, en une viscérale humanité. Fascinée par le travail d’Anne Nivat, cette journaliste prodige, récompensée entre autres par le prix Albert-Londres, l’auteure souhaite nous faire partager son admiration en un portrait attachant. Force est de reconnaitre que l’intention est bonne, que l’éclairage ainsi fait sur ce métier difficile (l’ouvrage porte d’ailleurs l’estampille de Reporters Sans Frontières) est ô combien nécessaire mais… La vie qu’elle croque ici ne réussit jamais à nous emballer. Si graphiquement les choix sont bons, ils se révèlent nettement plus savonneux coté récit. Daphné Collignon ne choisit pas… Elle hésite entre le carnet de route détaillé et passionnant, les parallèles évasifs avec sa propre condition, les confessions plus personnelles et sensibles d’Anne Nivat, l’interview pure et dure… Et si le méli-mélo est un régal pour les yeux, il ne fonctionne pas, narrativement parlant, l’auteure n’ayant pas trouvé un fil conducteur payant. Dommage ! Il y avait matière et indéniable talent.