L'histoire :
Parents, amis, pensionnaires… sont rassemblés pour rendre un dernier hommage à la petite Elisabeth Weatherley disparue alors qu’elle allait avoir 14 ans. Et tandis que tout le monde s’approche du cercueil pour y déposer une fleur ou une poignée de terre, il y en a une qui ne comprend rien à cette agitation : la petite Elisabeth Weatherley. Car c’est pourtant bien elle qui s’agite aux grilles du cimetière. Elle qui les observe. Elle qui sent une petite araignée la traversée de part en part, comme si son corps était devenu totalement invisible et inconsistant. La réalité serait donc là, dans ce petit cercueil en bois. Insupportable ! Au point de soulever le cœur et provoquer l’évanouissement. Pourtant, il semble que l’on prenne déjà soin d’elle pour lui offrir une nouvelle chance... Aussi la retrouvons-nous dans un grand lit, avec pour compagnons un magnifique chat-serpent et une adorable et peureuse chauve-souris-poulet. Elisabeth ne sait pas depuis combien de temps elle se trouve dans cette prison dorée. Ni pourquoi elle est là. Une chose est sûre : elle s’ennuie « mortellement ». Au point d’imaginer rapidement reprendre contact, par tous les moyens, avec sa sœur et ses amies…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Trois mouvements devraient animer le nouveau projet de l’étonnante Barbara Canepa. Au co-pilotage de l’excellente collection Métamorphose, celle-ci est toujours habile à nous balader dans un univers aux frontières du réel, tutoyant ici la mort avec subtilité. Trois opus pour 3 jeunes adolescentes, dont chaque initiale de prénom (Elisabeth, Nora et Dorothea) formera, une fois réunies, un titre de série fort de signification. Traduction littérale, donc, cette « fin » joue la délicieuse ambiguïté. Pour commencer, elle laisse le personnage d’Élisabeth voguer dans un entre-deux mystérieux, pour lequel on aura du mal à savoir de quel coté la bascule s’effectuera. Nous voilà aiguillonnés par le mystère de l’arrivée du personnage central dans un jardin en forme de cage dorée. Puis habilement accrochés aux intrigues entourant l’étrange pensionnat dans lequel Elisabeth étudiait. Ou encore suspendus au rôle que semble avoir tenu (ou devoir tenir) Dorothea et Nora dans le destin de leur sœur et meilleure amie. Bref, voilà un début qui, outre l’univers déployé, livre une première salve d’énigmes dont il nous restera à trouver toutes les clefs. Au-delà, Canepa livre une jolie somme de paraboles permettant de nourrir son propre questionnement (et par judicieux ricochet le notre) sur la mort, en particulier son inaliénable « complicité » avec la vie. Pour ce qui est de la forme, la partition graphique jouée à quatre mains en compagnie d’Ana Merli est un envoûtement parfait. L’univers mi-gothique ou totalement victorien se love impeccablement dans un style où l’épure des visages tutoie une colorisation travaillée et parfaitement contrastée. De fait, l’univers devient rapidement et volontairement inquiétant, pour asseoir un peu plus encore le propos. Bref, un véritable travail d’orfèvrerie superbement cadré, qui charme l’œil immédiatement, bien avant de s’approprier le récit. A suivre sans hésitation...