L'histoire :
Le petit Victor louche sur la coupe que son papa a jadis gagnée au football, derrière une vitrine du salon. Il redoute de ne jamais en gagner une aussi belle, parce que lui, à chaque fois qu’il tire aux buts, sa balle passe au-dessus. Son père l’encourage alors à persévérer, ce que Victor fait aussitôt, sur le terrain à côté de sa maison, avec ses copains. La chambre est rangée, les devoirs sont finis, il a l’autorisation. Théo, Jérémy et Léa dans les buts, l’attendent déjà. Hélas, encore une fois, dans le jeu, son tir passe au-dessus de la lucarne. Et son ballon se sauve de l’autre côté de la palissade. Victor se faufile à quatre pattes par un trou du mur et retrouve son ballon… stoppé tout contre un gros coffre. Curieux comme tout, il ouvre le coffre et découvre toute une panoplie de super-héros, customisée joueur de foot ! Il n’a même pas besoin d’essayer de les enfiler : ces habits magiques viennent tout seul l’habiller ! Stupéfait, il vole, maintenant ! Et il entend une voix qui lui annonce qu’il a été choisi pour organiser l’Euro, le championnat d’Europe des nations ! Ses copains n’en reviennent pas de voir Victor voler. Mieux que ça : avec ses nouvelles chaussures magiques, il colle la balle à chaque fois dans la lucarne. C’est ainsi qu’il récupère un nouveau coffre, contenant 10 mini-ballons, comme autant de stades à semer à travers la France pour accueillir les matchs…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si vous êtes en train de lire ces lignes, c’est que, quelque part, vous êtes soit amateur de foot, soit amateur de BD, soit les deux. Or malgré toute la tolérance et l’ouverture d’esprit possibles en ce bas monde, il est illusoire de ne pas voir dans cette « BD officielle » un produit marketing mou et niaiseux, déclenché par l’organisation française de l’Euro de football en juin 2016. Le scénario de commande exécuté par Benjamin Ferré devait assurément s’affranchir d’un cahier des charges impossible à tenir : raconter une histoire en 36 pages qui véhicule les valeurs positives du foot, qui mette en scène des enfants (cible idoine de la médiatisation de la pratique), qui récapitule la compétition quadri-annuelle « Euro de foot » (les villes des 10 stades) et qui accroche le public-cible à l’aide des registres en vogue : les super-héros et l’heroïc-fantasy. Oui, oui, la BD officielle de l’Euro de Foot 2016 mélange effectivement ces trois ingrédients dans une seule et même intrigue complètement inepte. Voici le pitch en une phrase : Victor trouve une panoplie de super-héros, qui lui permet de planter 10 stades en France, puis d’affronter avec ses copains, sur le terrain sportif, les forces du mal incarnées par le sorcier Lord Redkart et ses joueurs gobelins, ce qui lui permet de les transformer en forces du bien. Areuhgaga. Au sommet des répliques cultes, on trouve « Attrapons Lord Redkart, il ne faut plus qu’il embête les gens ! ». Et dire que, puissance médiatique oblique, ce pur nanar se vendra assurément à des dizaines de milliers d’exemplaires, sans rien refléter de l’inventivité du 9ème art actuel…