L'histoire :
Paradoxalement, Jennifer, 16 ans, est enceinte, alors qu'elle n'a jamais couché avec un garçon. Dès lors, sa vie est un enfer : ses parents ne la croient pas, les médecins (qui ont réellement constaté sa virginité) veulent l'enfermer pour en faire un sujet d'étude et la presse se déchaine. Elle, tout ce qu'elle veut, c'est avorter pour retrouver sa vie d'ado bien dans ses baskets : regagner son mec et participer au concours de danse qu'elle prépare depuis de longs mois. Un médecin exerce alors un mystérieux chantage sur ses parents et l'interne de force dans un centre médical surveillé. Les choses se précipitent lorsque son père est retrouvé assassiné chez eux d'un violent coup sur le crane. Sa mère se sent dès lors libérée du moyen de pression du corps médial. Elle la fait donc évader du centre surveillé et se réfugie chez deux petits vieux. Aussi incroyable que cela puisse paraître, Jennifer fait alors la connaissance de... ses grand-parents : des aïeuls détestables et acariâtres, dans une ferme sordide. Une seule nuit suffira à Jennifer pour détester ses grand-parents. Sa mère lui doit dès lors quelques explications. Mais dans un premier temps, c'est à la police, qui les a retrouvées, qu'elles donnent des explications...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans ce second volet de la trilogie annoncée, la romancière Barbara Abel alimente son thriller (religieux ? scientifique ? Social ? les trois à la fois ?) en alternant harmonieusement révélations et rebondissements, sur un rythme parfaitement prenant. La mésaventure vécue par son héroïne, une adolescente tout ce qu'il y a de plus normale, est intéressante en ce qu'elle en dit beaucoup sur les valeurs largement partagées par notre civilisation judéo-chrétienne. En effet, la problématique centrale ne choque pas, tant qu'elle reste vieille comme le monde : c'est l'immaculée conception qui défraya la chronique il y a 2010 ans et fonda notre Histoire, nos normes sociales. Mais injectez-la à notre décorum contemporain et le lecteur cherchera une solution rationnelle : y aura t-il une explication scientifique ? Jennifer serait-elle hermaphrodiajouterte (pourvue des deux sexes à la fois) et donc capable de reproduction en autarcie, à l'instar d'une espèce particulière d'escargot, comme le laissait entendre le premier tome ? La scénariste ne s'arrête pas à cette question en suspens et confère à l'intrigue bien d'autres mystères : quid du passé sordide de la mère de Jennifer ? Qui du meurtre de son père ? Jennifer gardera t-elle son bébé ? Le puzzle se reconstitue progressivement, mais les pièces principales manquent toujours. Un autre atout séduisant de la trilogie, mise en relief par son compagnon Gérard Goffaux, dans un registre graphique proche de certains comics américains, vient d'un développement d'intrigue qui s'affranchit des stéréotypes du marché, et elle n'en demeure pas moins palpitante. En ce sens, la liberté narrative laissée par Quadrants à l'endroit de la romancière est à saluer.