L'histoire :
Dan a une capacité parapsychique peu banale et pour le moins encombrante. Il suffit que quelqu’un soit kidnappé et maltraité alentours, pour que les traumatismes qui sont infligés à cette personne apparaissent aussitôt sur son propre corps ! Il se met alors à saigner, à ressentir des choses ou il voit des plaies apparaître subitement, dans la douleur… En plus, cela débute toujours dans les moments les plus inopportuns. Une fois qu’il a eu compris ce mécanisme, Dan s’est mis à collaborer avec les flics de la criminelle, qui le surnomme désormais « la boussole ». En effet, quitte à subir ce genre de stigmates, autant que cela serve à élucider les affaires. En outre, plus tôt elles sont résolues, plus vite les stigmates cessent. Dan accompagne donc Malika et Patrick, deux collègues policiers, chez les familles qui leur signalent un enlèvement. Et son feeling s’avère particulièrement efficace. Ce jour là, par exemple, alors qu'il est au lit avec une copine, son dos se couvre subitement de centaines de petites griffures et il tombe dans les vapes. Malika et Patrick le retrouvent alongé sur le sol chez lui. Ils le réveillent et l’embarquent chez les parents d’une jeune fille de 17 ans qui a disparu. Un passage dans la chambre de la demoiselle et Dan fait aussitôt le lien avec un bouquet de roses présentées dans un vase…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ces dernières années, Séverine Lambour et Benoît Springer multiplient les projets en duo et en dehors des sentiers battus. A l’image du format d’édition – de taille comics, reliure souple, sur 116 planches couleurs – ce one-shot se dévoile relativement inclassable. Entre polar et fantastique, la Boussole s’appuie sur les capacités psy d’un héros insolite, une sorte de profiler medium qui subit les maltraitances des personnes kidnappées. Le corps de Dan, ainsi que son ressenti, guident ainsi des seconds couteaux policiers dans la résolution de trois étranges affaires d’enlèvements. Ces trois enquêtes pourraient d’ailleurs être suivies de nombreuses autres, tant l’album montre un vaste potentiel. Car dans la forme, la Boussole dispose de sérieux atouts : une narration franche et directe, un dessin jeté minimaliste et néanmoins réaliste (la Springer’s touch), un découpage et des cadrages très « cinématographiques », qui prennent le temps d’installer des ambiances baroques… De fait, dans le fond, on reste sur notre faim : quid de la personnalité de Dan ? De son histoire passée avec la fille de Patrick ? De la découverte, de l’origine et du périmètre exact de son « don » ? Et tant pis si les mobiles des enlèvements sont survolés ou biscornus (surtout le cas des roses), on se délecte en contrepartie d’une touche d’humour décalé (Dan est systématiquement au plumard avec une fille, quand il subit les premiers stigmates d’une affaire). Bref, on aurait aimé approfondir la personnalité ambiguë du « héros » et diversifier les cas… Hélas, le contexte éditorial du 9e art est actuellement très restreint (il n’y a plus guère de place, dans le marché actuel, pour les séries au long cours). Tant pis, il faudra se satisfaire de ces 3 affaires, au léger parfum de mise en bouche.