L'histoire :
Jacques Daniel, 29 ans, est barman au Buveur d’étoiles, un « bar de nuit » fréquenté par des clients interlopes du côté du port du Havre. Ce soir-là, comme tous les autres, il embrasse sa compagne Mimi avant de partir travailler. Puis il traverse la ville à pied, en fumant des clopes. Sa patronne « Fanchon » l’attend, accoudée au comptoir du bar, toujours un peu vulgaire et agressive. Le service de Jacques commence. Une jeune gothique blonde vient s’enquiller 6 téquilas cul-sec, en compulsant sans cesse son portable. Le sulfureux Michel Tagorre, président du club de foot, s’installe dans un compartiment privé du bar. Un couple d’amoureux commande deux Guiness. Un début de bagarre éclate entre quelques jeunes éméchés. Jacques intervient et fiche le cogneur dehors. Puis entre alors une vieille connaissance du lycée, Fred Valda. Valda est comme gêné d’être reconnu par Jacques. Il a rendez-vous avec Tagorre… et disparait pour plusieurs heures derrière le rideau de son compartiment. La nuit se poursuit et se termine normalement. Sauf qu’en rentrant chez lui, Jacques a la désagréable surprise d’un petit mot de Mimi. Elle est partie et il ne faut pas qu’il la cherche. C’est un coup de tonnerre pour Jacques. Un second retentit le lendemain, lorsqu’il apprend en ville, par la rumeur, qu’une blonde a été retrouvée morte dans les eaux du port. Or Mimi est blonde… Jacques file chez les flics pour en savoir plus.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les normandes éditions Vagabondages publient le premier volume d’un roman graphique aux accents de polar local. Comme son nom l’indique, la ville de Le Havre sert en effet de décor à un polar noir et intimiste, lent, « à la Maigret ». Les scénaristes Jean-Blaise Djian et Popopidou insistent beaucoup sur cette ambiance, qui se déroule à 95% en nocturne. Quand il sort des nombreuses scènes dans le bar, le dessinateur Jay (Jérémy Lambert de son vrai nom) emmène quant à lui le lecteur dans un tourist-tour de cette ville portuaire reconstruite et marquée de l’architecture bétonnière d’Auguste Perret. Son encrage fortement encré (en noir et blanc) se montre finement ciselé, pour un rendu ultra-réaliste qui bénéficie à l’ambiance glauque du polar, malgré son aspect figé. Surtout, cet album se distingue de la norme par son originalité de traitement. Le terme « Roman graphique » n’est pas galvaudé, il est même appliqué au sens strict du terme. L’ouvrage se compose en effet d’une majorité de cases de BD, avec ou sans bords, souvent accompagnées d’un narratif romancé et dactylographié en leur marge. Voilà une sorte de croisement génétique entre la BD et le roman, plutôt bien équilibré dans son découpage. Tantôt le formatage BD est plus emprunté (quand l’action rythme le visuel), tantôt les états d’âme du principal protagoniste se racontent-ils en textes, jamais trop longs (toutes les pages comportent au moins un dessin). De fait, ce premier opus dispose de 110 pages, mais pour le moment l’intrigue est juste posée : il y a une morte, plusieurs suspects, une disparition et tout reste à élucider pour ce barman, que la proximité des évènements mue en enquêteur. A suivre…