L'histoire :
1951. Suite à son passé controversé, Li Fuzhi est exilé par le parti depuis maintenant quinze ans dans une région agricole au nord de la chine, à la ferme de Baoban. Marié de force à He Sao, une femme gentille mais secrète, il a pris son rôle de fermier à cœur et dirige son exploitation assez correctement. Un jour, il reçoit un télégramme de Pékin : il est convoqué par Kang Sheng, ancien camarade de combat, aujourd’hui devenu secrétaire général du ministère de la sécurité intérieure. He Sao est alors prise de panique et s’enfuit. Li Fuzhi se rend donc à Pekin et après quelques échanges de politesses, Kang Sheng lui apprend qu’il est réintégré au sein du parti, à son ancien grade militaire de capitaine. Pour le faire patienter en attendant sa nouvelle affectation, Kang Sheng lui demande d’accepter en exil dans sa ferme le grand poète Hau Rui, aux écrits de plus en plus subversifs. Aussitôt dit aussitôt fait, lorsque Li Fuzhi regagne Baoban, Hau Rui est déjà arrivé, étrangement accueilli par He Sao qui semble très bien le connaître…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après un premier épisode nominé en janvier 2005 à Angoulême dans la catégorie « meilleur premier album », Franck Bourgeron clôt son diptyque avec le même talent aux accents poétiques. Extrême orient met en scène de bien tristes destinés aux prises avec la révolution communiste chinoise et son flot de monstruosités. Persécution d’un poète, exils machiavéliques, mariage forcé… L’histoire de Li Fuzhi est bien davantage qu’une simple reconstitution historique. A travers un héros qui n’est pas maître de son destin, Bourgeron nous rappelle qu’il ne faisait pas bon vivre en Chine au milieu du XXe siècle. Le dessinateur s’en donne à cœur joie en utilisant nombre de hachures et s’inscrit aux côtés des auteurs de la « nouvelle vague » (Christophe Blain, Manu Larcenet, Franz Duchazeau, …). Les personnages ont les traits du bas du visage tout rabougris et des sourcils monstrueux, ce qui permet avant tout de les différencier… Ce parti pris original et néanmoins fantasque ne nuit en rien à la lisibilité du récit, par ailleurs cadré et mis en page de superbe manière. Le découpage ne s’appuie que sur très peu de cases par page et n’hésite pas à utiliser toute la hauteur des planches. Une réussite en deux tomes, à découvrir.